Tieres et proces civil
LE TIERS ET LE PROCES CIVIL
Noureddine GHAZOUANI
Agrégé des facultés de droit Avocat près la Cour de Cassation Président de l’Association Tunisienne d’Arbitrage et de Procédures
En matière civile, le procès s’agitant entre deux plaideurs, ne peut en principe profiter ou nuire aux intérêts des tiers. Motivées par leur égoïsme, les parties ont tendance à focaliser le débat au cours del’instance, ainsi que leurs demandes réciproques sur leurs intérêts exclusivement individuels. Dès lors, on pourrait être enclin à penser que lors du jugement, ceux des tiers seront épargnés. Par ailleurs, l’on conçoit mal aujourd’hui qu’une personne, n’ayant pas été partie à un procès, puisse être condamnée sans avoir été entendue. Le non respect des droits de la défense constitue la violation grave d’undroit naturel 1 , c’est pourquoi il est universellement reconnu que toute personne impliquée dans une affaire civile ou pénale a droit à un procès équitable 2 . Or, le respect des droits de la défense en constitue une garantie élémentaire ; et c’est la raison pour laquelle il est unanimement considéré comme une sorte de droit de l’homme et est formellement consacré par la constitution 3 . Il semanifeste en particulier dans le procès civil
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Motulsky (H), Le droit naturel dans la pratique jurisprudentielle : Le respect des droits de la défense en procédure civile, Ecrits, T. 2, p. 60 et s .; Mélanges Roubier, 1961, T. 2, p. 175 et s. ; Widerkehr Georges, Droits de la défense et procédure civile, D.S. 1978, Chronique p. 36 et s. ; Normand (J.), Les principes directeurs du procès,répertoire de procédure civile. 2 Convntion internaionale relative aux droits civiques et politiques, Résolution de l’Assemblée générale de l’ONU n° 2200 du 1.12.1966 et en particulier son article 14 ; La Tunisie a adhéré à cette Convention par la loi n° 30 de l’année 1968 du 29.12.1968. 3 Léauté, Les principes généraux relatifs aux droits de la défense, Revue Sc. Crim 1953, p. 47 et s. ; voir à titred’exemple l’article 12 de la Constitution tunisienne ; « Tout prévenu est présumé innocent jusqu’à l’établissement de sa culpabilité à la suite d’une procédure lui offrant les garanties indispensables à sa défense ».
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par le respect d’un autre principe de portée plus générale, celui de la contradiction. Le respect des droits de la défense n’en est qu’une illustration 4 . L’identificationdu principe du contradictoire à celui du respect des droits de la défense en matière pénale s’explique par le fait que, dans le procès pénal, le prévenu, ayant le rôle de défendeur à l’action publique, se trouve confronté à un demandeur omniprésent en la personne du Ministère public. Pour établir un certain équilibre, il est nécessaire de sauvegarder les intérêts de la partie faible, c’est à direceux du prévenu. La contradiction se ramène en fin de compte au respect de ses droits de défense. En revanche, dans le procès civil, ce principe est destiné à protéger équitablement les intérêts de toutes les parties en cause. Il profite par conséquent, tant au défendeur qu’au demandeur. Il suppose, dès lors, que le jugement qui en découle soit le résultat d’une confrontation entre elles. Chaquepartie a pu être en mesure de discuter et de contredire les prétentions, les moyens de défense et les arguments invoqués par son adversaire. Sans cela, il serait à craindre que la décision du juge ne soit orientée dans un sens favorable à celui qui a été entendu au détriment de celui qui a été privé de ce droit. La contradiction apparaît donc comme la garantie fondamentale, non seulement desparties en cause, mais également d’une justice saine et loyale. Dès lors, il serait injuste, voire aberrant, d’opposer à une personne, n’ayant pas été appelée ni représentée, une décision de justice rendue à son insu. Cette attitude est d’autant plus évidente que le procès demeure, en vertu du principe dispositif, « la chose des parties » 5 .
Rappelons également la déclaration des droits de…