Arrêt koné, plan détaillé

novembre 29, 2018 Non Par admin

Introduction

M. Koné, qui réside en France, est un immigré d’origine malienne qui fait l’objet d’un demande d’extradition de la part des autorités maliennes.
L’extradition est définie comme le fait, de la part d’un Etat, de remettre une personne, à un autre Etat, pour qu’il puisse être jugé ou qu’il puisse exécuter sa peine.

Le 22 mars 1994 le président de la chambre d’instruction de lacour suprême du Mali délivre un mandat d’arrêt à son encontre. M. Koné est accusé de « complicité d’atteinte aux bien publics et enrichissement illicite » tels qu’ils sont prévus par la loi malienne N°82-39/AN-RM du 26 mars 1982 et l’ordonnance N° 6/CMLN du 13 février 1974.
Le 17 mars 1995 un décret accorde l’extradition de M. Koné aux autorités maliennes.

L’extradition ayant été accepté parle gouvernement français, M. Koné a porté l’affaire devant le Conseil d’État en faisant valoir que les autorités maliennes lui reprochaient ses liens avec les dirigeants, du Mali, avant leur renversement.
De ce fait, M. Koné déduit qu’il y a une violation de l’article 5 de la loi du 10 mars 1927, relative à l’extradition des étrangers, qui interdit l’extradition en raison d’infractionspolitiques et lorsqu’elle est demandée dans un but politique.
De plus, M. Koné demande l’annulation du décret du fait des deux erreurs matérielles, portant sur le nom matrimonial de Mme Cissoko et sur la date de l’ordonnance (N° 6/CMLN du 13 février 1974) présente sur l’une des copies, qui ont été commises.

De son côté, le ministre de la justice soutient que ce n’est pas cette loi qui prévaut maisbien l’accord bilatéral, conclu entre la France et le Mali, signé le 9 mars 1962. Cet accord ne reconnaît pas l’interdiction de l’extradition en fonction du mobile de la demande.
Le commissaire du gouvernement reconnaît la jurisprudence constante en la matière (CE 23 octobre 1991, « Urdian Cirizar »), le fait que la convention prime sur la loi, mais il demande, dans un avis, au CE de reconnaître unprincipe général du droit concernant l’extradition. Ce principe reconnaitrait que l’Etat puisse refuser une extradition lorsqu’elle est demandée dans un but politique. Les principes généraux du droit sont des règles de portée générale qui s’appliquent même en l’absence de texte, qui sont dégagées par la jurisprudence et qui sont « découverts » par le juge. Bien que certains aient une valeurconstitutionnelle, la doctrine dominante considère qu’ils sont infra-législatifs.

Outre la question relative aux erreurs matérielles, le CE doit définir si M. Koné est fondé à agir, au titre de la loi du 10 mars 1927, ou que sa demande est irrecevable du fait de la convention du 9 mars 1962.

Le CE, Assemblée, dans sa décision du 3 juillet 1996, affirme que les erreurs matérielles sont,respectivement, « sans incidence sur la légalité dudit décret » ni « de nature à entacher d’irrégularité le décret attaqué ».
Ensuite, et surtout, le CE reconnaît l’invocabilité du principe. De plus, le CE ne suit pas la demande du commissaire du gouvernement et voit, dans ce principe, un principe fondamental reconnu par les lois de la république (PFRLR). Les PFRLR sont des principes à valeurconstitutionnelle du fait de leur rattachement au Préambule de la Constitution de 1946.

En l’espèce, il s’agit d’un arrêt de principe en matière d’extradition. En effet, pour la seconde fois seulement, le CE dégage un PFRLR avant le Conseil Constitutionnel. De plus, cet arrêt, du fait de la consécration d’un nouveau PFRLR, entraine un accroissement significatif des garanties pour les personnes faisantl’objet d’une procédure d’extradition (I). Enfin, le CE précise la place, dans la hiérarchie des normes, des principes généraux du droit, de la Constitution et des conventions internationales et, cet arrêt, rappelle que le juge administratif suprême dispose d’un pouvoir d’interprétations des normes (II).

I) L’élévation au rang de PFRLR d’un principe fondamental du droit de l’extradition…