Commentaire de l’arrêt du 16 mars 2010

novembre 21, 2018 Non Par admin

La loi impose aux banquiers diverses obligations qu’il est parfois difficile de délimiter, c’est pourquoi dans cet arrêt de rejet rendu le 16 mars 2010, la Chambre commerciale de la Cour de cassation vient rappeler que ces obligations ne sont pas pour autant inconciliables.
En l’espèce, une société a recruté par l’intermédiaire d’une autre, un comptable qui a détourné des fonds. La sociétélésée a alors assigné en responsabilité la société de recrutement ainsi que la banque qui tenait le compte du comptable.
Par un arrêt du 18 septembre 2008, la Cour d’appel de Paris statuant sur renvoi après cassation a rejeté la demande tendant « à voir déclarer la banque responsable des préjudices subis » par la société lésée.
La société lésée forme donc un pourvoi en cassation afin que soitretenue la responsabilité de la banque du fait de son obligation de vigilance particulière « compte tenu des négligences qu’elle avait commisses lors de l’ouverture du compte ».
La Cour de cassation rejette l’arrêt au motif que les mouvements de compte, du fait de leur régularité « ne constituaient pas des anomalies de fonctionnement que la banque aurait dû relever » et que, compte tenu del’obligation de non-ingérence à laquelle la banque est tenue, elle n’a pas commis de faute.
Le devoir de non-ingérence ne fait-il pas obstacle à l’application de l’obligation de vigilance à laquelle est également soumis le banquier ?
Il va donc falloir s’intéresser à chacune de ses obligations, l’obligation de vigilance tout d’abord, qui existe tout au long de la vie du compte (I) et le devoir denon-ingérence ensuite (II) qui est essentielle au bon fonctionnement d’un compte (II).

I/ L’obligation de vigilance

L’obligation de vigilance se traduit de différentes manières, elle consiste dans un premier temps en des vérifications à l’ouverture du compte (A) et prend ensuite la forme d’une surveillance du fonctionnement du compte (B).

A- Les vérifications lors de l’ouverture du compteL’article R312-2 du Code monétaire et financier prévoit que le « banquier doit, préalablement à l’ouverture d’un compte, vérifier le domicile et l’identité du postulant, qui est tenu de présenter un document officiel comportant sa photographie ».
Dans l’arrêt du 16 mars 2010, le client de la banque avait fournit, pour l’ouverture de son compte, « une carte d’identité périmée portant une adressedifférente de celle qui déclarait être la sienne », de ce fait, la Cour d’appel de Paris a jugé que « la banque devait faire preuve d’une vigilance particulière relativement au fonctionnement du compte de ce client compte tenu des négligences qu’elle avait commises lors de l’ouverture du compte ». Du fait de la péremption des papiers d’identité du client, le banquier aurait du faire preuve d’unevigilance accrue. Toutefois cette vigilance n’est pas caractéristique à l’ouverture d’un compte, elle doit se poursuivre tout au long de la vie du compte.

B- La surveillance du bon fonctionnement du compte

L’obligation de surveillance est relativement récente car jusqu’alors, un principe absolu existait, celui de non-ingérence, le banquier devait alors se contenter d’exécuter les ordres deson client. Aujourd’hui l’obligation de vigilance est une dérogation à ce principe de non-ingérence du banquier dans les affaires de son client mais la Cour de Cassation, par cet arrêt du 16 mars 2010, vient rappeler que ces deux obligations ne sont pas inconciliables.
En effet, dans cet arrêt, les parties se prévalent de cette obligation de vigilance pour fonder leur demande en responsabilité dela banque, ce qui est toutefois écarté par la Cour d’appel étant donné que « les mouvements de comptes n’ont pas connu de variation importante tant en débit qu’en crédit, susceptibles d’appeler l’attention de la banque, mais des flux soutenus au cours de l’année examinée » et que, par conséquent, « ces faits ne constituaient pas des anomalies de fonctionnement que la banque aurait dû…