« Refaire le monde ! » est-ce le rôle de l’écrivain ?

janvier 9, 2019 Non Par admin

Le rôle de l’écrivain est une problématique qui se pose régulièrement dans les media spécialisés ou au sein de l’enseignement par exemple. Le rôle de l’écrivain est-il celui de « refaire le monde » ?
Il est vrai que certains écrivains émettent des opinions précises sur tel ou tel sujet et endossent donc ce rôle. Cependant, l’écrivain ne peut pas être réduit à cette seule fonction d’écrivainqu’on peut qualifier d’« engagé ».

Il convient tout d’abord de définir précisément l’expression « refaire le monde ». « Refaire le monde », c’est vouloir le modifier, le rendre différent, le déconstruire pour le reconstruire autrement. C’est discuter, débattre et polémiquer sur des sujets de société (politiques, sociétaux…), trouver ce qui ne va pas et chercher des solutions pour un monde meilleur.« Refaire le monde » est souvent une expression familière voire péjorative car employée à propos de personnes dont on pense qu’elles n’ont ni les clés ni la compétence pour changer quoi que ce soit.
Vouloir changer le monde est la fonction première de beaucoup d’écrivains dits « engagés ». Ceux-ci se servent de leurs écrits, que ce soit des romans, du théâtre ou des essais, pour énoncer des idées,des opinions et les propager. C’est le cas de beaucoup d’écrivains du 19ème siècle tels Emile Zola ou Victor Hugo. Dans ‘Germinal’, Zola dénonce, entre autre, les conditions de travail des ouvriers mineurs et met en évidence leur misère et s’engagera même en politique. Hugo s’engagera également dans la lutte sociale, persuadé que le poète remplit une mission comme il l’écrit dans son poème« Fonction du poète » : « Le poète en des jours impies Vient préparer des jours meilleurs. Il est l’homme des utopies… On le raille. Qu’importe ! il pense. Plus d’une âme inscrit en silence Ce que la foule n’entend pas… ». D’autres exemples plus anciens peuvent montrer que le rôle de l’écrivain est de « refaire le monde ». C’est le cas de Montaigne au 16ème siècle qui, dans ses « Essais », lutte contrel’intolérance dans un climat de guerres de religions. Malraux qui fut également écrivain et homme politique est parfois considéré comme la plus grande conscience du 20ème siècle. Avec ses romans historiques et d’aventure (« La Condition Humaine », « L’espoir »), il dénonce tantôt la dictature de Franco en Espagne tantôt il met en évidence son anticolonialisme et son antifascisme.
Très récemment, lelivre de Stéphane Hessel « Indignez-vous » s’est avéré être un vrai phénomène de société. L’auteur établit plusieurs préceptes et encourage le lecteur à s’engager contre le système économique, le conflit israélo-palestinien,… le tout de manière non-violente. Cet exemple illustre parfaitement notre propos : Hessel nous encourage en quelque sorte à sortir de notre léthargie et à ne pas accepter lasociété telle qu’elle est : il refait le monde.
A travers ces exemples, on peut sans conteste affirmer que l’écrivain endosse le rôle de refaire le monde. Sans être un maître à penser, il nous donne des clés pour nous guider, nous alerte sur des faits de société qui, sans lui, seraient peut-être passés inaperçus.

Peut-on néanmoins limiter le rôle de l’écrivain à celui de « refaire le monde » ?Sa seule fonction n’est-elle que de nous interpeler, nous alerter sur des faits de société et les dénoncer ? Sa seule tâche n’est-elle que de nous faire prendre conscience des injustices de ce monde ?

Évidemment non. Beaucoup d’écrivains ont pour vocation de nous distraire tout simplement, c’est-à-dire littéralement d’ « éloigner de notre esprit ce qui nous fatigue ou nous obsède ». On peut seplonger dans un livre pour clore une journée de travail ou se préparer au sommeil et dans ce cas, le rôle de l’écrivain n’est plus de débattre ou polémiquer sur des faits de société et de chercher ou proposer des solutions. Il doit alors nous permettre de nous évader, nous procurer un bien-être, une détente, une évasion ou même nous permettre de nous identifier aux personnages. C’est le…