Le toucher, la pudeur, l’intimité et le respect de l’autre en psychomotricité
Cpse – Psychomoricité – ESPM UF6
Approches psychocorporelles appliquée à l’intervention psychomotrice
Les corps dans la relation d’aide
Cours de Samira Bourhaba
Le toucher, la pudeur, l’intimité et le respect de l’autre en psychomotricité
Travail présenté par Luc HAVARD
Qui repousse qui ?
La scène se passe lors d’une séance d’aide thérapeutique en petit groupe. Il y a troisenfants présents plus moi et une psychomotricienne. L’une des méthodes de travail c’est d’inviter les enfants dans le jeu sensori-moteur, collectivement, via les blocs de mousse (type Aucouturier). Nous nous sommes inventés un jeu qui consiste à construire une grosse montagne de mousse, puis à l’escalader. Celle-ci s’effondre alors sous notre propre poids et nous nous faisons « engloutir » par lesmousses. Quelque fois nous tombons les uns sur les autres, sans violence, en douceur. Ce jeux procure énormément de sensations corporelles aux enfants et ils l’adorent. Ma collègue et moi adorons aussi ce jeu, je l’avoue sans honte et c’est, d’ailleurs, l’un des fondements de l’intervention en psychomotricité : le partage du plaisir dans le jeu.
Je suis plus particulièrement chargé d’intervenirauprès de B. qui m’a déjà fort bien investi depuis les premières séances. L’enfant souffre de ce qu’on appelle aujourd’hui, pudiquement, un « trouble envahissant du développement » mais dans lequel je penser détecter ce qu’il convient bien d’appeler une structuration psychotique. Ce jeux de la montagne qui s’écroule et sous laquelle nous nous retrouvons souvent enfouis, est non seulementl’occasion, pour les enfants, d’éprouver des sensations corporelles et un plaisir intenses, mais c’est aussi pour moi une formidable opportunité de me rapprocher au plus près des enfants, d’entrer en contact physique, corporel avec eux. Bref c’est un formidable moyen de pouvoir se toucher, sans heurts ou presque, mais surtout sans méprise quand à l’intentionnalité de mon geste. Nous nous retrouvons encontact par hasard, en fonctions des aléas de la montagne qui s’éboule. De temps à autre on se retrouve même l’un sur l’autre. Dans ces circonstances, le comportement de B. était presque toujours le même : dans un premier temps, il semblait prendre beaucoup de plaisir à tomber sur moi, et moi je l’accueillais à bras ouvert et il semblait bien se laisser faire. Il semblait accepter cet accueilspontanément. Mais le contact ne durait jamais. Il me repoussait ensuite fortement de ses deux bras, pour remettre de la distance et puis se redressait pour aller recommencer.
Au début, je n’avais pas bien réalisé cela. Puis, en visionnant les vidéos des séances, je me suis rendu compte, qu’effectivement, il ne restait pas bien longtemps au contact. J’ai même d’abord crû que c’était moi qui,inconsciemment, le repoussait. C’est d’ailleurs ma collègue qui m’avait interpellé là-dessus : « Pourquoi ne le gardes-tu pas dans tes bras quand il arrive ainsi. On dirait vraiment que tu le repousses ! »
Les séances qui suivirent, j’entrepris donc d’être plus attentif à ce qui se passait dans ces moments là. J’observai que c’était bien l’enfant qui, après s’être laissé prendre dans mes bras, merepoussait avec tonus et moi, je répondais inconsciemment à ce repoussé, comme en miroir de l’enfant. Je répondais, non seulement par un lâcher, mais aussi par léger repoussé. Ce repoussé de l’enfant semblait correspondre avec le moment ou précisément je prenais du plaisir dans le contact corporel. Je serai même tenté de dire dans le contact « charnel ». L’enfant changeait alors brusquementd’attitude : Son visage passait d’un seul coup d’une expression de plaisir très forte à une forme de stupeur, voire d’effroi et il détournait brusquement les yeux. On aurait dit que, après avoir réalisé que j’étais un être humain, exprimant ses émotions, son plaisir… Il ne pouvait plus me voir. Il refusait de me voir. Il se détournait alors, me repoussait, puis se relevait. Mais le plus étrange c’est,…