« Le dit des perdrix » fabliau anonyme xiiie siècle

novembre 26, 2018 Non Par admin

Objet d’étude I : L’argumentation ; convaincre, persuader, délibérer.
Portraits de femmes

Introduction

(captatio) Depuis l’Antiquité, la littérature satirique a souvent pris pour cible les femmes. Cette dimension critique se poursuit au Moyen-âge, notamment dans les fabliaux. (présentation) Les fabliaux se développent en France à partir du XIIe siècle. Ils sont, à l’origine, écrits envers et en ancien français, et étaient récités par des jongleurs lors de fêtes ou dans les foires.(thèmes principaux) Le fabliau des « Perdrix », également intitulé « Le dit des perdrix », met en scène une tromperie, construite autour de trois personnages : une femme gourmande et rusée parvient, à l’aide de ses mensonges, à berner son mari, un paysan naïf et impulsif, et un prêtre. (problématique)[1]« Le dit des Perdrix » apparaît comme un texte argumentatif original : le caractère foncièrement distrayant de cette histoire va de paire avec sa dimension morale. Il s’agira donc de mettre en évidence cette alliance, a priori paradoxale, entre le comique et l’argumentation.(annonce du plan) Dans cette perspective, nous nous intéresserons tout d’abord à la structure de l’extrait en montrantqu’il s’agit d’un texte vif et plaisant (rappel méthodologique : vos axes doivent comporter un adjectif ; ainsi, vous portez un véritable jugement argumenté sur le texte). Dans un second temps, nous réfléchirons à la dimension satirique du passage.

I) Un fabliau vif et plaisant

Destiné à être récité ou joué en public, le fabliau doit interpeler, faire rire, tout en faisant réfléchir. Aussi, ildoit être vif et plaisant. Pour éviter toute monotonie, le texte est donc organisé en trois parties différentes, de taille inégale.
a) une structure diversifiée
Le passage s’ouvre sur une intervention du conteur (lignes 1 à 3), intervention formulée au discours direct et au présent d’énonciation : « j’ai coutume de dire des fabliaux » (ligne 1), « je veux conter » (lignes 1 et 2). Ici, le conteurs’adresse directement à tous ceux qui l’écoutent. Immédiatement, l’utilisation du présent d’énonciation crée une situation de communication dynamique.
La deuxième partie du fabliau est un récit, où alternent temps du passé, le passé simple et l’imparfait (« Il prit grand soin de les préparer… elle s’en tirait fort bien » (lignes 3 et 4)), et le présent. A côté de ces passages narratifs, leconteur insère des parties dialoguées, courtes et vivantes : « Alors, elle sont cuites, les perdrix ? » « Seigneur, dit-elle, quelle catastrophe ! Le chat les a toutes mangées ! « (lignes 24/25) Ces courts passages de dialogue, particulièrement vifs, peuvent nous faire penser à des répliques de théâtre qu’échangeraient le vilain et son épouse lors d’une scène de ménage. Ici, le fait d’avoir recoursà une histoire plaisante et à des personnages fictifs nous indique que le fabliau relève majoritairement de l’argumentation indirecte (le conteur argumente de façon détournée, via une fiction) et de la persuasion (il s’agit de distraire et de séduire le public tout en le faisant réfléchir).
La dernière partie du passage est une morale, formulée au discours direct. Le conteur, une fois son récitterminé, reprend la parole pour s’adresser une dernière fois à son auditoire : « Ce fabliau prouve, par un exemple, que femme est faite pour tromper » (ligne 53). Comme le révèlent l’utilisation du présent de vérité générale et les formulations globalisantes (« femme est faite pour tromper »), cette morale a une portée universelle et fait office de thèse. Ici, on peut considérer que le narrateurargumente de façon directe puisqu’il énonce clairement l’idée générale qui sous tend toute son histoire.
b) un récit mené tambour battant
Dans « Le dit des perdrix », le rythme est soutenu, et les péripéties multiples, ce que révèlent, notamment, les nombreux verbes d’action (« elle se hâte d’attaquer une perdrix (ligne 9), elle va au milieu de la rue (ligne 10), il arrive à la maison (ligne…