Etude de texte theatrale
QUELQUES REMARQUES SUR L’ÉTUDE DES TEXTES DE THÉÂTRE
« On oublie, on ignore ou l’on feint d’ignorer que l’on se trouve en face d’oeuvres dont la caractéristique essentielle est d’être écrite sous forme de conversation pour être jouée. » (Pierre Larthomas, Le langage dramatique)
I/ Une énonciation/réception particulière L’art est un acte de production sociale inscrit dans le réel du monde. Sanspréjuger de ce qui fait qu’un acte social parmi d’autres est artistique ou non, (vaste débat autant philosophique, qu’esthétique, sociologique et commercial) l’art littéraire est un acte d’énonciation/réception « réversible », d’abord fondé sur un pacte qui fait qu’un marché de la réception reconnaît la production d’un texte. Cela s’établit alors selon une relation réelle et réversible Auteur /Lecteur (certes l’auteur produit un texte, mais puisque celui-ci n’existe que lu, c’est le lecteur qui actualise ce texte) qu’on peut schématiser ainsi : I Auteur Lecteur Réel organisé autour d’un objet réel ———————————————-le Texte—————————————————–Fiction qui génère des relations fictives feuilletées, II permettant des remontées entreniveaux b vers a ou a vers b voire de II vers I : (a) (Narrateur …………………………..> Narrataire) (s’il y a une voix récitante) (b) personnagespersonnages personnagespersonnages
Le texte théâtral lu utilise exactement le même système d’énonciation/réception, (sans niveau II a). Le texte théâtral joué instaure un relais supplémentaire « réel » : l’acteur, ce qui transforme le schémaprécédent ainsi : I Auteur ActeurActeur Spectateur
Réel Qui s’approprient le niveau réel : ——————la langue du Texte, partition de didascalies & textes à dire—————-Fiction pour générer des relations fictives feuilletées, II permettant des remontées de b vers I : (b) personnagespersonnages personnagespersonnages Le théâtre est donc toujours inscrit dans l’ici-maintenant del’acteur/lecteur/spectateur (posture de réception d’un texte/partition produit par un auteur et non un narrateur) : l’énonciation fondamentale du théâtre se produit dans du réel : une scène : espace limité, une bouche de lecteur, un corps d’acteur, des corps de
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spectateur : le personnage n’est qu’une fiction née des mots (lus par le lecteur, dits par l’acteur), ce n’est que le produit d’uneproduction langagière, ce n’est pas le moteur d’une interprétation.
« Le mode d’expression au théâtre ne consiste pas en mots, mais en personnes qui se meuvent sur scène en employant des mots. » (Ezra Pound) « Le théâtre n’est pas un lieu où nous figurons, mais un lieu où nous passons avec et que nous avalons. Le lieu où nous mangeons le temps visiblement et en parlant. L’acteur n’est instrument derien, ni outil de personne : il ne figure pas. C’est un parlant qui tient dans sa bouche l’espace en vrai, tout un théâtre entre ses dents, un porteur de paroles, orant et carnassier. » (Valère Novarina, Texte de présentation de « La chair de l’homme », 1995)
II Une partition à lire avant de l’interpréter. « En Fac », « au bac », vous n’êtes ni acteur, ni spectateur : vous êtes lecteur : donc gardez laposture de lecteur, y compris et surtout lors de la lecture. Cela implique que pour vous dans « l’ici-maintenant » de l’étude du texte tout est texte et peut être objet d’étude : le titre, la didascalie initiale (liste des personnages, indication de décor) dont le fonctionnement diffère pour lecteur et spectateur. Donc il faut lire aussi les didascalies et il faut lire le texte à dire comme unmusicien déchiffre une partition : sans interprétation. Lire simplement la langue : c’est à dire la ponctuation, les temps des verbes, les indices de lieu. C’est cela qui donne, en lecture, conscience de « l’ici-maintenant » d’une part, et d’autre part, du jeu « En scène / Hors scène », dont on parlera plus loin, mais qui est l’un des « moteurs » du jeu théâtral, notamment dans la théâtralité classique,…