Conseil d’état, 6 mars 2009 – l’abrogation d’un acte non réglementaire créateur de droits et illégal
L’abrogation d’un acte non réglementaire non créateur de droits et illégal est possible à tout moment ; si l’acte est légal, son abrogation est possible pour divers motifs (retrait d’une autorisation d’occupation du domaine public pour tout motif d’intérêt général). En revanche, l’abrogation d’un acte non réglementaire créateur de droits est possible dans trois cas seulement : si les conditionsdu retrait sont remplies (c’est-à-dire si l’acte est illégal le retrait est possible dans un délai de quatre mois) ; si le bénéficiaire du droit en fait la demande ; dans les cas prévus par les lois et règlements en vigueur.
C’est à propos de l’abrogation d’un acte non règlementaire créateur de droits et illégal que le Conseil d’Etat rendra son arrêt « M. Coulibaly », le 6 mars 2009.
Enl’occurrence, M. Coulibaly, originaire de Côte d’Ivoire, obtient en 1992 un diplôme de chirurgien – dentiste délivré par l’université d’Abidjan. Et ce, après avoir eu une formation se déroulant dans le cadre d’un accord de coopération entre les universités d’Abidjan et de Montpellier I : il a donc étudié les trois premières années à l’université d’Abidjan, et les deux dernières années à l’université deMontpellier I. Dans celle-ci, il a soutenu sa thèse, et a été reconnu apte à obtenir le diplôme de chirurgien – dentiste.
Par la suite, M. Coulibaly demande la naturalisation française, il l’obtient par un décret du 11 décembre 2003. Il sollicite alors son inscription au tableau de l’ordre des chirurgiens – dentistes de l’Hérault, elle lui est accordée par une décision du Conseil départemental le15 mai 2004. Ensuite, M. Coulibaly souhaite transférer le lieu d’exercice de sa profession, à titre de salarié, dans le département de l’Isère, et pour cela il demande son inscription au tableau du département, elle lui est accordée le 5 octobre 2004. Puis en 2006, M. Coulibaly veut exercer sa profession à titre libéral et transférer le lieu d’exercice de sa profession à nouveau, pour revenir dansle département de l’Hérault et demande donc son inscription au tableau de ce département. A cette occasion, le Conseil national de l’ordre des chirurgiens – dentistes s’aperçoit que le diplôme détenu par M. Coulibaly n’habilite pas celui – ci à exercer la profession de chirurgien – dentiste en France, du fait que le diplôme n’est pas français ou européen. Le Conseil national informe le Conseildépartemental de l’Isère de cela, et par une décision du 4 juillet 2006, le Conseil départemental radiera M. Coulibaly du tableau, soit environ deux ans après son inscription.
M. Coulibaly saisit alors le Conseil régional de l’ordre des chirurgiens – dentistes de Rhône – Alpe pour demander l’annulation de la décision de radiation ; mais ce dernier rejette sa demande par une décision du 25 septembre2006. Il saisit ensuite le Conseil national de l’ordre de sa profession pour demander l’annulation de la décision du Conseil régional, mais celui – ci rejette pareillement sa demande par une décision du 22 décembre 2006. M. Coulibaly forme alors un recours pour excès de pouvoir, contre la décision du Conseil national de l’ordre des chirurgiens – dentistes du 22 décembre 2006, auprès du Conseild’Etat.
Les juges du Conseil d’Etat ont donc dû se demander : Est – il possible pour l’administration d’abroger une décision expresse individuelle créatrice de droits et illégale, après un délai de quatre mois courants à partir de l’intervention de celle – ci ?
En l’espèce, le Conseil d’Etat fait droit aux prétentions de M. Coulibaly, et annule la décision du Conseil national de l’ordre du 22décembre 2006, et condamne aussi le Conseil national à verser au requérant la somme de 3 000€.
Le Conseil d’Etat rappelle donc ici les conditions cumulatives nécessaires à l’inscription au tableau de l’ordre des chirurgiens – dentistes ( I ) ; il souligne également l’impossibilité d’abroger une décision expresse individuelle créatrice de droit et illégale passé un délai de quatre mois ( II )….