Commentaire composé: dom juan tirade de l’inconstance

janvier 10, 2019 Non Par admin

Lorsque Sganarelle dresse le portrait de son maître dans la scène d’exposition de DJ, il le dépeint comme « le plus grand scélérat que la terre eut jamais porté, un enragé, un chien, un Diable, un Turc […] » et d’accumuler les qualificatifs les plus infamants pour permettre de saisir la personnalité de ce « grand seigneur méchant homme ». C’est dire si l’arrivée du personnage éponyme sur scèneest attendue par un public qui au XVII° siècle, l’a déjà vu mis en scène quelques années auparavant par Dorimond (1658) ou Villiers (1659) C’est la dimension de séducteur de ce personnage en passe de devenir un véritable mythe littéraire que Molière met en avant dans la premier acte de sa pièce. A ce titre, la tirade au centre de la scène 2 peut apparaître comme une profession foi libertine danslaquelle DJ prône le credo qui gouverne ses relations amoureuse. Cet éloge de l’inconstance, face à un Sganarelle incrédule, est une véritable leçon de savoir faire rhétorique. C’est pourquoi il s’agira de se demander dans quelle mesure cette tirade tout en thématisant la séduction s’apparente à une entreprise de séduction, autrement dit, comment Don Juan met en pratique dans la construction de sondiscours les principes théoriques qu’il y expose.
Il s’agira d’éclairer dans un premier temps le fonctionnement de son entreprise de séduction avant d’analyser le portrait du séducteur ainsi mis en place.

I) Une entreprise de séduction :

Pour DJ, le première personne à séduire est son valet Sganarelle. Sa tirade est donc un long discours argumentatif où se mêlent les armesrhétoriques.

1) énonciation :

Tout d’abord, le choix énonciatif participe de sa stratégie. Il s’agit au première abord d’un discours adressé directement à son valet, présent dès la première ligne. « Quoi ? tu veux […] »(l.1) . Mais cet interlocuteur n’est convoqué que pour mieux être occulté par la suite. Aucune mention n’en sera faite dans la suite de la tirade dominée par les pronomsindéfinis ou généralisateurs, le « on », le « nous », ou encore les formes impersonnelles « il n’est rien de si doux […]. Le « je » demeure présent toutefois, mis en évidence sous sa forme tonique quand il apparaît pour la première fois « pour moi » (l.5). Il est utilisé dans les deux phrases qui suivent pour se dissimuler derrière un « on » avant de revenir en force à la fin de la tirade lorsde la comparaison à Alexandre « et j’ai sur ce sujet l’ambition des conquérants ». (l.17). Cet entremêlement subtil des pronoms personnels permet à Dom Juan de généraliser sa position et d’impliquer l’interlocuteur qu’il soit fictif , Sganarelle, ou réel, le public.

2) procédés de généralisation de son discours :

La même stratégie gouverne l’emploi des formes sentencieusesproche de la maxime : « La constance n’est bonne que pour les imbéciles » (l. 4) ou encore « tout le plaisir de l’amour est dans le changement. » (l.10) L’emploi de verbe d’état conjugué au présent gnomique ainsi que l’emploi d’articles définis confèrent à ces phrases une valeur de vérité générale proche du proverbes. Aussi, Dom Juan intègre-t-il son cas particulier « pour moi » au sein d’un discoursgénéralisateur, partagé par tous et donc que les interlocuteurs ne manqueront pas de partager, d’où l’emploi des questions rhétoriques au début de la tirade.

3) structuration rigoureuse du discours :

Enfin, l’argumentation repose sur une construction rigoureuse du discours qui souligne la conviction du personnage et témoigne de son désir de persuader. La tirade débute par uneprésentation de la thèse adversaire qu’il mine de l’intérieur par une indignation feinte (« Quoi ! l.1) et l’emploi d’une métaphore dépréciative (« de s’ensevelir pour toujours dans une passion, et d’être mort dès sa jeunesse[…] l.2 et 3). En effet, pour Dom Juan la fidélité est mortifère ce qui justifie son refus de s’y plier (« non, non » l.4). Il expose alors sa thèse personnelle dont la…