Les hommes ne vivent-ils ensembles que par intérêt ?
Dissertation de philosophie
Les hommes ne vivent-ils ensembles que par intérêt ?
Sade écrivait, dans la Nouvelle Justine « Je suis l’homme de la nature avant d’être celui de la société. » explicitant bien le doute qui peut régner dans le rapport nature/société. Si Sade semble reconnaître l’existence de la société et d’un homme social, il affirme ne pas l’être par nature.
L’est-il parintérêt ? Il est en effet connu pour avoir agi dans la société en fonction de ses instincts, ses plaisirs… Et, plus généralement, si les hommes vivent ensembles, est-ce simplement parce que c’est auprès des autres qu’ils peuvent trouver leur bonheur ? L’homme utilise-t-il son prochain dans un but strictement personnel ? Se sert-il de la société dans une idée bien précise ? De plus, si les hommes nevivent ensembles que par intérêt, cela sous-entend qu’ils ont eu le choix de vivre seuls. Mais ne pourrait-on pas penser que l’homme est, par nature, social ? Dès sa naissance, il appartient à cette société élémentaire qu’est la famille. N’est-ce pas une obligation pour lui d’appartenir à une communauté ? Enfin, en admettant que les hommes vivent ensembles seulement par intérêt et non par nature,serait-ce là l’unique raison ? En effet, les hommes paraissent se contraindre et agir souvent avec sagesse pour un bien être commun : leur intérêt est collectif.
Nous verrons tout d’abord que l’homme est social par nature en étudiant des thèses comme celle d’Aristote selon laquelle l’humanité même ne peut se concevoir en dehors de la société. Mais si pour certains la société est indispensablepour la survie de l’homme, pour d’autres elle n’existe pas, ou du moins, elle est fondée sur des intérêts strictement personnels (tels que la recherche de profit, de plaisir…), c’est ce que nous analyserons par la suite. Enfin, les hommes, en vivant ensembles, n’agissent pas seulement égoïstement, mais aussi et surtout dans le but d’un intérêt collectif. En effet, ils sont contraints de se retenirpour le bien commun, d’instaurer des règles au nom de la morale.
L’homme est souvent considéré comme le plus évolué des êtres vivants. Mais en quoi se distingue-t-il principalement des autres individus ? Quel est le propre de l’homme, sa particularité ? Aristote répond que l’homme est un animal social et raisonnable (D’ailleurs, l’espèce à laquelle l’être humain appartient, Homo Sapiens,signifie homme sage, raisonnable). Selon lui, l’homme vit en société par nature. C’est naturellement que se forme une famille, une vie politique… L’homme n’a pas le choix : lorsqu’il naît, il appartient directement à une communauté – la famille. C’est une obligation. Ainsi, l’intérêt ne peut pas être un motif à une appartenance communautaire, puisque l’homme est avant tout un être social. Les hommes nevivraient alors pas ensembles seulement par intérêt, puisqu’ils vivraient ensembles d’abord – et c’est important – par nature, par obligation. C’est dans La Politique qu’Aristote énonce ceci : « La cité est au nombre des réalités qui existent naturellement, et (…) l’homme est par nature un animal politique. Et celui qui est sans cité, naturellement et non par suite des circonstances, est ou un êtredégradé ou au-dessus de l’humanité. Il est comparable à l’homme traité ignominieusement par Homère de : Sans famille, sans loi, sans foyer, car, en même temps que naturellement apatride, il est aussi un brandon de discorde, et on peut le comparer à une pièce isolée au jeu de trictrac. ». Nous voyons bien ici qu’il rejette la thèse selon laquelle la cité serait contre-nature et que l’homme àl’état de nature est asocial, que c’est en se dénaturant qu’il pourra entrer dans la vie politique, ou tout simplement la vie civile. Ainsi, la Cité est « antérieure à la famille et à chacun de nous pris individuellement. Le tout, en effet est nécessairement antérieur à la partie, puisque le corps entier une fois détruit, il n’y aura ni pied ni main, sinon par simple homonymie et au sens où l’on…