L’artiste et la commande publique à la renaissance
Sujet : L’artiste et la commande publique à la Renaissance.
En France, la fameuse mesure du « 1% culturel », instaurée dans un contexte de regain d’intérêt pour la création contemporaine, initié par le ministère Malraux dans les années 1960 et réactivé sous le ministère Lang, dans les années 1980, astreint de nos jours chaque institution publique, du collège à l’ambassade, à consacrer uncentième de son budget annuel à une réalisation d’ordre culturel ; par le biais de commandes publiques, les artistes contemporains ont pu ainsi investir l’espace public.
Toutefois, le phénomène de la commande publique n’a rien de nouveau. C’est notamment à partir de la Renaissance qu’il se généralise, parallèlement aux commandes privées (princières ou non) et ecclésiastiques, qui marquent unecontinuité avec l’époque médiévale. En quoi s’en différencie-t-elle ? La commande publique se destine à l’espace public de la cité. Si elle peut être le fait du prince ou d’une personne privée, elle peut donner également lieu à une souscription publique, caractéristique plus inédite.
La multiplication des commandes publiques à la Renaissance, dans ses premiers foyers, au début du XVème siècle, que sontl’Italie du Nord et les Flandres, est en effet à relier avec la montée en puissance d’une classe sociale bourgeoise et marchande, et partant, actrice au sein de l’espace public.
La notion d’espace public quant à elle, est un anachronisme qui dissimule la segmentation de la cité de la Renaissance entre espaces religieux ou laïques, gérés par le prince, l’Eglise ou une corporation, bien que publics dupoint de vue de leur fréquentation.
Quelles sont les spécificités du rapport qui s’instaure entre commande publique et artistes à la Renaissance ?
La première, qui obéit à des cadres et des caractéristiques originaux, bouleverse l’ancien statut de l’artiste corporatif, en même temps qu’elle subit ou profite du changement occasionné.
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L’émergence des commandes publiques et leurmultiplication dès le début du XVème siècle sont en effet liées à l’enrichissement et à la montée en puissance d’une bourgeoisie principalement constituée de marchands et d’artisans. Organisée en corporations aussi solidaires qu’elles peuvent être oppressantes, dans le cas à part de la création artistique, elles font valoir leur nouveau pouvoir financier au sein de villes souvent autonomes, qu’il s’agissedu regroupement marchand des villes de la Hanse aux Pays-Bas ou des cités-républiques de l’Italie du Nord, comme Florence, Sienne et Venise. L’espace public s’y organise comme le reflet de la prospérité et de la puissance de la cité, comme un espace de représentation qu’il importe d’embellir.
La souscription publique, associée à la commande, est une caractéristique nouvelle à la Renaissance.Principalement le fait des corporations de métiers, elle propose aux artistes des chantiers où mettre à l’épreuve, et le cas échéant faire la réputation, de leur talent. A Florence, par exemple, la très puissante corporation des métiers de la laine, la Calimala, prend en charge la gestion du Baptistère San Giovanni et du Duomo. C’est ainsi qu’elle organise en 1401 un concours pour des portes enbronze faisant suite à celles réalisées par Andrea Pisano plus de cinquante ans plus tôt. De même, mais dans un registre pictural cette fois, à Louvain, Rogier van der Weyden réalise, autour de 1425, une grande Déposition (aujourd’hui au Prado à Madrid) pour la confrérie des arbalétriers : leur emblème, l’arc, apparaît traité comme un motif orfévré aux angles de la composition. D’ordre religieux, cesont bien des commandes publiques en ce sens qu’elles prennent place dans un espace largement fréquenté, celui de la chapelle, dans l’église, ou celui de la rue, et qu’elles sont le fait d’un groupe social entier.
La notion même d’espace public est l’autre composante importante de ces commandes. La redécouverte des sources antiques, l’illustre exemple d’Athènes et de Rome où la vie de la…