Commentaire d’arrêt cass. soc. 18 mars 2009
Commentaire d’arrêt
Cass. Soc. 18 mars 2009
Nul n’ignore l’importance des qualifications juridiques en droit du travail et les difficultés à résoudre les conflits qu’elles peuvent engendrer. Une nouvelle preuve en est fournie par l’arrêt rendu par la Cour de cassation le 18 mars 2009 à propos de la mise à pied conservatoire appréhendée sous l’angle de sa distinction, souvent délicate,avec la mise à pied disciplinaire.
Un salarié avait été convoqué à un entretien préalable à un éventuel licenciement, assorti d’une mise à pied conservatoire de trois jours, c’est-à-dire jusqu’à la date de l’entretien. Après vérification de ses explications, l’employeur avait procédé, près d’un mois plus tard, à son licenciement pour faute grave. Le salarié contestait la mesure ; pour lui lamise à pied constituait une peine interdisant le prononcé du licenciement pour les mêmes faits.
La Cour d’appel fait droit à sa demande, et condamne l’employeur à un rappel de salaire et au versement d’indemnités pour le licenciement jugé sans cause réelle et sérieuse. L’arrêt d’appel énonce que la mise à pied conservatoire est nécessairement à durée indéterminée.
Il convient donc de sedemander si une mise à pied à durée déterminée peut être une mesure conservatoire ?
La cour de cassation casse l’arrêt d’appel et répond par l’affirmative, la mise à pied prononcée par l’employeur dans l’attente de sa décision dans la procédure de licenciement engagée dans le même temps a un caractère conservatoire.
La Cour de cassation ne fait pas état dans l’arrêt de la condition relative àla durée de la mise à pied conservatoire (I), désormais, une mise à pied pourra être une mesure conservatoire ; mesure qui ne saurait être une sanction ne se confondant pas avec la mise à pied disciplinaire, dès lors que la mise à pied est prononcée par l’employeur, dans l’attente de sa décision dans la procédure de licenciement engagée dans le même temps (II).
I) De la nécessaire duréeindéterminée à la possible durée déterminé de la mise à pied conservatoire
L’arrêt du 18 mars 2009 constitue un revirement de jurisprudence, désormais la Haute Juridiction ne fait plus état de la nécessaire durée indéterminée s’agissant de la mise à pied conservatoire, et ce, par opposition à la teneur de la jurisprudence antérieure (A). Le critère relatif à la durée constituait pourtant un enjeuconsidérable (B), en ce qu’il permettait la distinction de la mise à pied ayant un caractère disciplinaire de celle ayant un caractère conservatoire.
A) La durée indéterminée comme critère de la mise à pied conservatoire
La mise à pied disciplinaire et la mise à pied conservatoire, constituent deux catégories juridiques distinctes qui obéissent à des régimes juridiquement différents. Toutl’enjeu se situe alors dans les critères permettant leur distinction.
Conformément à la teneur de la jurisprudence antérieure de la Cour de Cassation, une mise à pied décidée par l’employeur pour un temps déterminé revêt un caractère disciplinaire. Désormais, depuis l’arrêt de la chambre sociale du 18 mars 2009, la durée indéterminée de la mise à pied n’est plus le critère décisif de la qualificationde mise à pied conservatoire. En d’autres termes, la mise à pied à durée déterminée peut avoir une nature conservatoire. Le présent arrêt constitue donc un revirement de jurisprudence.
Historiquement, la jurisprudence relevait à la fois la durée déterminée de la mise à pied et la qualification disciplinaire donnée à la mesure par l’employeur lui-même. Ainsi, la mise à pied prononcée pour unedurée de trois jours « sans préjuger d’une éventuelle autre sanction » (Soc.30 juin 1992), ou qualifiée par l’employeur de « sanction immédiate et prononcée pour une durée déterminée » (Soc. 3 mai 2001), n’était pas une mesure conservatoire mais disciplinaire.
Par la suite, la jurisprudence a appliqué avec rigueur la règle selon laquelle « la mise à pied conservatoire étant nécessairement à…