Villes

novembre 26, 2018 Non Par admin

Introduction :

Le second poème « Villes » ou Villes II, dit aussi poème de l’Acropole ne suit pas immédiatement le premier poème Villes. Rimbaud a intercalé entre ses deux poèmes « Vagabonds » donnant plus de relief à ses deux poèmes qui peuvent être lus simultanément étant donné les nombreux chiasmes entre les deux textes. Le XIXème siècle est celui du remodelage des grandes villes, du boulevardHaussmann, de l’expulsion à la périphérie des couches sociales les plus basses, le peuple du vieux Paris. Les villes ont connu depuis toujours un développement considérable et ont toujours fasciné les êtres humains. Ce poème est avant tout une critique de la vision idéale de la ville apparue avec « Ce sont des villes » exprimant par cette exclamation, un idéal, une harmonie et qui dans ce secondpoème devient source d’angoisse par le gigantisme de ses édifices.

1-L’énormité et la structuration des villes

« L’acropole officielle outre les conceptions de la barbarie moderne les plus colossales » qui ouvre le débat met l’accent sur le gigantisme des villes, Acropole (cité haute), métropole (mère de la cité) mégalopole (grande ville) autant de termes qui attestent de la ville comme d’unmiroir à la hauteur du génie humain, d’où parfois la démesure. Dans le premier texte des « villes », les métropoles apparaissaient comme de gigantesques carrefours spatio-temporels, harmonieux, rayonnants, idylliques. Les « Alléganys » des Etats-Unis côtoyaient les « Libans de rêve » et les boulevards de Bagdad dans la plus grande harmonie. Dans ce texte les villes apparaissent comme des espaces structurés,des lieux d’immigration mais aussi d’exclusion, des carrefours où se rencontre dans le plus complet désordre des espaces et des temps différents. Les barbares de la Grèce, ces étrangers qui ne sont pas de la ville, qui ne sont pas civilisés, se perdent dans ces espaces qui ne sont pas à dimension humaine où qui ne leur sont pas accessibles. Les villes modernes reproduisent en les grandissant lesmerveilles classiques, ajoute ça et là quelques espaces verts, des parcs, des squares plus petits, des cours plantés d’arbres. Toutes les dimensions sont outrées, les espaces réservés aux expositions sont gigantesques car rien n’est assez grand lorsqu’il s’agit de montrer sa réussite, et le spectateur habituel des expositions dans les musées est ici un spectateur perdu. Carrefour de peuples, laville est aussi un carrefour d’influences, c’est un « Nabuchodonosor norvégien qui a construit les escaliers des ministères », unealliance de mots pour traduire ces villes de ce XIXème siècle, alliance de colonisateurs et de colonisés, riche de L’Orient antique avec ses traditions et l’Europe nordique moderne. Tous ces peuples se retrouvent dans une même alliance de pensée, d’influence pour laréalisation d’une gloire commune. « Les boissons polaires se payent en monnaie indienne » met en évidence le caractère incohérent des villes modernes coloniales ou colonialistes. Dans ce gigantisme, le visiteur ne peut s’y retrouver, « mesurer la profondeur de la ville », toute reconnaissance est impossible.

2-Les villes, des espaces théâtraux

Alors que le promeneur de la cité grecque découvrait destemples, des théâtres, des lieux de spectacle, le promeneur de la ville moderne découvre des commerces, des cafés ou l’on sert des « boissons polaires ». Dans cette ville, le visiteur, spectateur assiste à une autre forme de théâtre, les boutiques, les cafés, assimilés à des circus, sont devenus les nouveaux espaces scéniques où se jouent des représentations. La ville est, comme un théâtre, éclairéeartificiellement par des candélabres géants, de « la lumière qu’on a crée », car avec la hauteur des immeubles et le ciel immuablement gris, la clarté est faible et le jour mat. Mais « les boutiques doivent contenir des drames assez sombre » ajoute à l’angoisse des villes et donne l’impression que c’est un spectacle de mort qui semble s’y jouer. Toujours hanté et traumatisé par son arrestation et…