Politique de la ville
¿ Interrogations ? – Revue pluridisciplinaire en sciences de l’homme et de la société. Numéro 4. Formes et figures de la précarité. Juin 2007. http://www.revue-interrogations.org
Fiche technique :
La Politique de la Ville : les enjeux d’une action publique conjointe
VIEILLE-MARCHISET GILLES :
Maître de conférence habilité. Laboratoire de sociologie et d’anthropologie de l’Université deFranche-Comté.
En France, la Politique de la Ville est une administration de mission, qui s’est progressivement mise en place à la fin du vingtième siècle. D’abord dénommée Développement social des quartiers (DSQ), cette action publique se nomme ensuite Politique de la Ville, avant d’être aujourd’hui intégrée dans une perspective de cohésion sociale. Sa philosophie est issue de groupes deréflexion des années 1970, notamment au sein du comité interministériel Habitat et vie sociale, prônant une action sociale globale afin de lutter contre toutes les nouvelles formes d’exclusion dans les zones urbaines déshéritées. Cette politique étatique vise à la « la restauration de tous les aspects de la vie sociale des grands ensembles à partir d’une rénovation du bâti à l’élaboration de laquelleles habitants sont invités à participer »1. Elle se caractérise par des actions variées (construction et entretien des
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bâtiments, insertion, médiation, action socioculturelle, sport, etc.), organisées sousle sceau de la transversalité, de la proximité et de la citoyenneté. Son mode d’intervention publique valorise la contractualisation et le conventionnement, pour amener différents partenaires publics et privés (Etat, collectivités, associations, entreprises, etc.) à travailler ensemble dans des zones urbaines clairement identifiées : les banlieues2. Elle est au cœur d’enjeux sociaux, scientifiqueset politiques, que nous proposons de dévoiler en trois temps : primo, une description des dispositifs et des instances institutionnels en présence (la face émergée de cette politique) ; secundo, une analyse des enjeux et processus à l’œuvre dans l’élaboration progressive de cette action publique (sa face immergée); tertio, les apports et les limites de la Politique de la Ville, à la base d’unerenouvellement des formes d’action publique en France.
Le développement de cette politique publique transversale se fait en cinq temps. 1- En 1981, à la suite de l’arrivée de la gauche au pouvoir, les émeutes urbaines de Minguettes à Vénissieux prennent les allures d’un véritable séisme politique. Se mettent en place parallèlement les Missions locales pour l’emploi, le Conseil national dudéveloppement social des quartiers (1981) et les Zones d’éducation prioritaire (1982). Une commission présidé par Hubert Dudebout, député-maire de Grenoble, est diligentée et remet un rapport intitulé Ensemble, refaire la ville. Elle insiste sur le rôle de l’accumulation des handicaps sociaux, sur l’insuffisance des services, sur l’isolement et la dégradation de la vie dans certains quartiers. En 1983,est installé le Comité national de prévention de la délinquance suite au rapport Bonnemaison, Face à la délinquance : prévention, répression, solidarité (1982). La mission Banlieues 1989 est à ce moment mise en place. 2- Lors du retour de la gauche en 1988, les dispositifs en la matière sont relancés avec la création du Comité interministériel des villes (CIV) et de la Délégationinterministérielle de la ville (DIV). Suite aux émeutes de Vaux-en-Velin, lors de l’été 1990, l’Etat se mobilise massivement dans quatre cents quartiers : un ministère de la Ville est créé, une loi sur la Ville est promulguée en 1991, avec notamment la
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