Poemes
Paul VERLAINE (1844-1896) Poèmes saturniens
*
Chanson d’automne
Les sanglots longs
Des violons
De l’automne
Blessent mon coeur
D’une langueur
Monotone.
Tout suffocant
Etblême, quand
Sonne l’heure,
Je me souviens
Des jours anciens
Et je pleure
Et je m’en vais
Au vent mauvais
Qui m’emporte
Deçà, delà,
Pareil à la
Feuille morte.
Charles GUÉRIN (1873-1907)Fleurs de neige
*
Requiem d’automne
Tout ce que le monde m’offre ici-bas
pour me consoler me pèse.
Imitation de Jésus-Christ.
L’automne fait gronder ses grandes orgues grises Et célèbre le deuil des soleils révolus,
L’avare automne entasse aux rebords des talus
Les vols de feuilles d’or que flagelle la bise.
Stérile et glacial reliquaire où s’effrite
Ce qui nepeut pas être avec ce qui n’est plus,
L’âme s’entrouvre, et son fragile cristal nu
Vibre et s’étoile au bruit des branches qui se brisent.
Le dôme clair de la forêt tremble sans trêve,
Tandisque, prompt et froid et sifflant comme un glaive,
Le vent aigu du Doute effeuille tes croyances.
Que ce soit donc l’automne enfin de ta jeunesse,
Ô toi qui vas, au temps où les roses renaissent, Ramasser d’âcres fruits sous l’arbre de Science.
* Charles BAUDELAIRE (1821-1867) Les Fleurs Du Mal
Chant d’automne
I
Bientôt nous plongerons dans les froides ténèbres ;
Adieu,vive clarté de nos étés trop courts !
J’entends déjà tomber avec des chocs funèbres
Le bois retentissant sur le pavé des cours.
Tout l’hiver va rentrer dans mon être : colère,
Haine, frissons,horreur, labeur dur et forcé,
Et, comme le soleil dans son enfer polaire,
Mon coeur ne sera plus qu’un bloc rouge et glacé.
J’écoute en frémissant chaque bûche qui tombe ;
L’échafaud qu’on bâtitn’a pas d’écho plus sourd.
Mon esprit est pareil à la tour qui succombe
Sous les coups du bélier infatigable et lourd.
Il me semble, bercé par ce choc monotone,
Qu’on cloue en grande hâte un…