Pingaud

novembre 26, 2018 Non Par admin

Le « quatrième pouvoir » supposé exercer un contre-pouvoir aurait-il outrepassé son rôle Serait-il devenu, au fil du temps, le juge suprême du politique, formulant la sanction et exerça l’application de la peine ? Signe des temps, France Culture nous offre désormais une intéressant émission intitulée, tout simplement, « Le premier pouvoir ». Depuis plus de vingt ans, en effet, montée en puissancedes médias, et singulièrement de la télévision, semble inexorable, au poi de modifier l’écosystème de la démocratie. C’est ce que nous disent une certaine « médiologie et les médias eux-mêmes, fascinés par leur prétendue influence. C’est ce que répètent beauco d’hommes politiques pour mieux justifier leur impuissance ou leurs lâchetés. C’est ce q dénonce une critique de gauche radicale, prompte àtirer un trait d’égalité entre force de frap médiatique et domination idéologique. Pourtant, la thèse est-elle si certaine ? Ou, pl exactement, n’est-elle pas obsolète ? L’histoire des médias nous apprend en effet que les rapports entre médias et société n’o cessé de se modifier. Les évolutions de la société (individualisme, consumérisme, délitement lien social, mondialisation, etc.) et lestransformations de la démocratie (rôle de l’Ét affaiblissement de la politique et des politiques, crise de la représentation, effacement d partis, etc.) ne restent pas sans effet sur la place et le rôle des organes d’information. L’analy des médias a trop souvent tendance à ne s’intéresser qu’à leur mécanique interne développement, indépendamment de leur environnement. Au fond, elle présuppose lepouvoir d médias, se contentant d’en rechercher la nature et les effets. Régis Debray a raison de moqu ceux qui veulent créer un « homo mass-mediaticus sans attaches historiques et sociales ». Il ne s’agit pas ici de reprendre dans ses détails l’histoire des médias (Jean-Noël Jeanneney, p exemple, l’a très bien fait), mais de rappeler qu’elle n’est pas linéaire, ni surtout indépendante d la société quiles entoure : la place et le rôle des moyens d’information dans les sociét européennes ont beaucoup évolué en fonction des techniques, mais aussi du contexte. Si l’on a p parler d’un « âge d’or » de la presse avant la guerre de 1914-1918, les médias modernes prennent vraiment leur essor qu’après la Grande Guerre. L’entre-deux-guerres voit le triomp des médias de masse et de propagande, politiséset souvent violents, dont le pouvoir de nuisan est certain. À l’inverse, et paradoxalement, la consolidation d’une presse d’opinion et l’émergence la télévision, encore sous influence gouvernementale, après la Seconde Guerre mondiale, ouvren une séquence au cours de laquelle la politique paraît assujettir les médias. Ce n’est qu’à la fin de années 1960 et au cours des années 1970, quand la presse« de référence » prend le pas sur presse « partidaire » et quand la télévision s’installe dans tous les foyers, que sonne l’heure d’un certaine émancipation à l’égard du pouvoir. Il faut souligner ici – même si cela relève l’évidence – que la presse de parti disparaît, non par la volonté des journalistes, mais av l’affaiblissement des partis politiques et l’épuisement progressif du militantisme demasse. Le pouvoir grandissant des médias sur la scène publique va se manifester alors de de manières. D’une part, la puissance de la télévision comme vecteur de l’information et du déb démocratique modèle durablement le mode de production de la politique. La figure de l’orateur du visionnaire doit faire progressivement place à celle de l’acteur et du pragmatique. D’aut

part, le mythe du «journalisme d’investigation », libre de tout pouvoir (et de toute limite structure profondément l’ensemble des médias. Déjà fragilisée par l’individualisation de société, la politique devient une cible privilégiée de l’idéologie de la transparence. Puissance de la télévision, désacralisation du politique Quand la télévision, dans un modèle non encore affaibli par la multiplication de l’offre de…