Parfum exotique

septembre 27, 2018 Non Par admin

SEQUENCE 3 : Les Fleurs du mal, Charles BAUDELAIRE (OI)
Séance 3 : « Parfum exotique »

Introduction

Ce sonnet ouvre, dans la section « Spleen et Idéal », le cycle consacré à Jeanne Duval. La fusion de l’érotisme et de l’exotisme, caractéristique de ce cycle, tient à la personnalité de Jeanne Duval, mulâtresse extrêmement sensuelle. Baudelaire la rencontre à son retour de l’île Maurice en1842. Mais ici, la femme s’efface très vite devant la puissance de son parfum qui engendre la vision et le poème, comme l’indique d’ailleurs le titre, « Parfum exotique ».

(lecture)

Composition

Le premier quatrain nous montre le rôle du parfum, tandis que le second marque le point de départ du voyage, d’abord sensuel. Enfin, les deux tercets évoqueront la transformation de ce voyagesensuel en un voyage idéal.

Problématique

Nous analyserons dans quelle mesure le poème est marqué par un mouvement de crescendo : le sonnet s’actualise de plus en plus et il se clôt sur un état d’extase provoqué par le jeu des correspondances.

Premier quatrain

L’attaque du poème, « Quand, les deux yeux fermés, en un soir chaud d’automne » est d’ordre anecdotique. Elle indique lesconditions qui concourent à rendre le climat de rêverie à l’origine de la vision. On y trouve l’attitude de la rêverie (« les deux yeux fermés »), le moment qui la favorise (le « soir ») et la saison propice au regret et à la nostalgie (l’ « automne »). Les conditions climatiques (« soir chaud ») évoquent déjà des contrées exotiques. C’est dans un univers clos que l’imaginaire se déploie, l’espace estcirconscrit par la nuit.
Le verbe attendu après la conjonction « quand » est doublement mis en valeur par un effet d’attente et par sa position en début de vers : « Je respire l’odeur de ton sein chaleureux ». Le motif du « sein chaleureux » présente une forte connotation érotique mais révèle aussi l’importance de l’image maternelle. L’intimité amoureuse aboutit à une régression car lebonheur, pour Baudelaire, est toujours lié à l’enfance.
Le verbe de la principale n’apparaît qu’au vers 3. Il est mis en relief de la même façon que « Je respire ». Le lien étroit qui unit l’odorat et la vue est souligné par la conjonction « quand » qui traduit la simultanéité et la position symétrique des verbes en début de vers : « Quand … Je respire… Je vois ». La magie suggestive du parfumprovoque le déploiement de la vision : « Je vois se dérouler des rivages heureux ». L’évocation des « rivages heureux » succède à celle du « sein chaleureux ». Un paysage exotique vient se substituer à la figure féminine. On perçoit alors nettement le rôle joué par la femme : libératrice de l’esprit et de la vision, elle n’est au fond qu’un prétexte au rêve. Après avoir accompli son rôle demédiateur, elle peut disparaître. Elle s’efface en effet des visions suivantes et ne réapparaîtra qu’une fois à travers son parfum : « Guidé par ton odeur… » (v. 9)
La vision du poète est toute intérieure puisqu’il voit « les deux yeux fermés ». Le poème perd alors son caractère anecdotique pour dévoiler un aspect visionnaire : il se transforme en un tableau exotique.
Tous les mots du vers 4s’accordent à souligner la qualité de cette lumière régnant sur le paysage : « Qu’éblouissent les feux d’un soleil monotone ». Le verbe, mis en relief en début de vers, insiste sur son intensité (« éblouissent ») ; le pluriel (« les feux ») évoque une lumière fécondée par ses multiplies reflets sur l’eau. Le soleil et la mer inaugurent donc la vision d’un monde paradisiaque – le soleil est symbole devie, la mer de liberté et d’infini – qui va se préciser dans le second quatrain.

Second quatrain

L’île, évoquée au vers 5, représente à plusieurs titres le paradais originel : nettement délimitée, préservée de la civilisation, c’est le lieu utopique par excellence, le symbole de l’Age d’or. Elle incarne aussi toutes les aspirations de l’imaginaire. L’île illustre enfin le mythe de la…