Michel chauvière trop de gestion tue le social
PRESENTATION DE L’AUTEUR ET DE L’OUVRAGE
Michel Chauvière est sociologue, directeur de recherche au CNRS, membre du CERSA (centre d’études et de recherches de sciences administratives et politiques). Ses travaux portent sur les politiques du social et du familial, sur les acteurs privés et publics, avec un intérêt particulier pour les processus de professionnalisation des intervenants, lesmouvements sociaux et la mise en œuvre des droits des usagers dans la régulation sociale.
Ses travaux des années 90 et 2000 portent sur la déconstruction de l’action sociale. En 2004, il a signé un ouvrage sur Le travail social dans l’action publique. Sociologie d’une qualification controversée. L’un des intérêts de ce dernier essai est de reprendre une partie de ses travaux et de tenter une approcheplus politique.
LA PROBLEMATIQUE
A travers l’analyse du nouveau lexique largement inspiré de l’entreprise qui s’est imposé dans le secteur social, Michel Chauvière montre que la domination de la gestion empêche un véritable travail social et prépare ce dernier à la marchandisation.
L’auteur ne remet pas en cause la nécessité de la gestion mais le « trop de gestion » et éclaire ses effetssociaux, quand la gestion n’est plus au service de l’action mais devient un pouvoir sur l’action.
INTRO
Nous avons en France, une autre culture de l’action collective orientée vers le social, celle du service public, de l’intérêt général, de la délégation sur fond de non-lucrativité, valeur commune au secteur public et au monde associatif contre précisément les valeurs du marché…
Dès la fin desannées 1970, « le new public management » vient d’en haut, à travers les études de rationalisation des choix budgétaires (RCB), avant d’être puissamment renforcé par la loi organique sur les lois de finances (LOLF) et sa culture de résultat au début des années 2000. Si la mesure a été préparée sous le gouvernement socialiste de Lionel Jospin, elle a été mise en œuvre par ses successeurs etfinalement votée à l’unanimité.
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Loi organique relative aux lois de finances (LOLF) du 1er août 2001, met en place de nouveaux modes de gestion dans les administrations, reposant sur la performance.
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Beaucoup de textes législatifs récents ont repris à leur compte le principe libéral de subsidiarité. Ilétablit les bases d’un partage des compétences entre l’Etat, renvoyé aux seules missions de souveraineté (police, justice…) et la société civile, lieu des solidarités nationales mais aussi terrain par excellence du marché. Parallèlement, la notion de gouvernance s’est progressivement répandue dans toutes les entreprises, lucratives ou non, publiques ou privées. Elle incorpore le marché dans cettecompétition, pour qu’advienne une action publique performante.
juillet 2007 : Lancement d’une révision générale des politiques publiques (RGPP) Selon le gouvernement, les mesures doivent se traduire par quelques 7 milliards d’euros d’économies d’ici 2011, comportant notamment le non-remplacement d’un fonctionnaire de l’Etat sur deux partant à la retraite entre 2009 et 2011. Elles reposent toutessur la conjonction d’une amélioration de la qualité du service public et d’un moindre coût. La rémunération à la performance sera étendue à tous les dirigeants
La RGPP doit également permettre d’améliorer la qualité de service. S’agissant de l’accueil, les guichets uniques à distance seront renforcés (internet et boîte vocale).
– Les services à la personne –
L’utilisation de l’aide àdomicile comme pépinière de nouveaux emplois, s’est trouvée légitimée dans le cadre de la lutte contre le chômage, il y a des pans entiers du travail social qui se privatisent au sens où ils se marchandisent, les aides à domicile rebaptisés services à la personne en sont un très bon exemple. Pareille évolution engloutit au passage une partie des spécificités cliniques du travail social au profit d’un…