Les poètes francais de la renaissance et pétrarque
REVUE D’HISTOIRE LITTERAIRE DE LA FRANCE
Les poètes français de la Renaissance et Pétrarque. Études réunies par Jean Balsamo. Envoi par Jean-Paul Barbier-Mueller. Avant-propos par Michel Jeanneret. Collection « Textes et Travaux de la Fondation Barbier-Mueller pour l’Étude de la poésie italienne de la Renaissance », N° 1. Genève, Librairie Droz, 2004. Un vol. de 520 p. Le volume s’ouvre parune présentation de la Fondation Barbier-Mueller, qui met à la disposition des chercheurs une collection de plus de quatre cents recueils poétiques italiens dans des éditions du XVIe siècle, dont des raretés bibliographiques (Jean Paul Barbier-Mueller). L’avant-propos de Michel Jeanneret rappelle le rôle central de Pétrarque dans l’histoire culturelle de l’Europe et propose, pour célébrer le septcentième anniversaire de la naissance du poète, de réévaluer son influence et celle de ses imitateurs italiens sur les poètes français du XVIe siècle. Le but, précise Jean Balsamo dans son introduction, n’est pas d’établir un catalogue des références pétrarquiennes, mais de montrer la fécondité dans la durée de l’imitation de Pétrarque. L’histoire de la réception française du Toscan est ensuiteretracée à partir d’une mise au point sur les éditions de son œuvre au XVIe siècle conservées en France, particulièrement éclairantes sur les choix d’une poésie française à la recherche de sa propre excellence. En découle l’organisation du volume en cinq sections. La première section est consacrée à la naissance du pétrarquisme à la cour de François Ier. Jean Balsamo insiste sur l’importancefondatrice des traductions de Marot, qu ‘il replace dans leur contexte culturel et littéraire. Lancée par le roi, qui cherchait à mettre l’héritage pétrarquien au service de ses prétentions impériales, mise à la mode par la prétendue découverte du tombeau de Laure (1533), l’œuvre lyrique de Pétrarque suscita à la cour de multiples imitations entre 1533 et 1540, et les Opere Toscane d’Alamanni (Lyon,1532-1533) donnèrent en italien l’exemple d’une imprégnation lexicale et d’une réutilisation créatrice des formes, des genres, des structures métriques et grammaticales empruntés à Pétrarque. Mais ce fut Marot qui, en traduisant vers pour vers Six sonnets de Pétrarque, choisis de manière à rendre l’opposition « in vita / in morte » du Canzoniere, associa l’expression pétrarquienne de l’amour à une formeprivilégiée, le sonnet, qu’il adapta au français en lui donnant une marque spécifique, la disposition des rimes dite marotique dans les tercets. Le Chant des Visions de Marot, qui traduit la canzone 323 de Pétrarque, est illustré dans deux manuscrits sur vélin, l’un à Berlin, l’autre à Glasgow. Par une comparaison précise des deux, Myra Orth et Richard Cooper remettent en question les datationsdu Professeur J. B. Trapp en montrant que les aquarelles de celui de Glasgow, reproduites en annexe, ont sans douté été inspirées par les emblèmes de celui de Berlin, et que leur source artistique commune est française : le manuscrit de Glasgow a dû servir de modèle aux gravures à l’eau-forte attribuées à Gheraerts dans deux éditions londoniennes du poème de Marot (1568). Pour Romana Brova,l’influence de Pétrarque sur Marot, dans les six sonnets traduits du Canzoniere, aussi bien que dans les Psaumes, se reconnaît à des procédés similaires dans le traitement des sources bibliques, au même souci d’édifier le prince, et au détournement du discours amoureux conventionnel à des fins morales et religieuses. Les itinéraires spirituels et littéraires des deux poètes sont comparables : Pétrarque aété un modèle pour Marot. Paola Cifarelli compare deux versions de la traduction des Triomphes par un magistrat provençal, Jean Maynier d’Oppède, vers 1538. La version manuscrite, offerte au connétable de Montmorency, est sans doute une œuvre de jeunesse relativement autonome par rapport aux traductions antérieures. Le texte imprimé chez Denis Janot en offre une version remaniée, adaptée au…