Le eu de l’amour et du hasard

novembre 27, 2018 Non Par admin

Le Jeu de l’amour et du hasard

Marivaux

Acte III, scène 6

De « ARLEQUIN, à part. Préparons un peu cette affaire-là… » à « j’entre en confusion de ma misère ! »

Introduction

Cet extrait du Jeu de L’amour et du hasard illustre le génie comique de Marivaux. C’est d’abord la situation qui prêt a rire : du quiproquo (=Méprise qui fait prendre une chose, une parole ou une personne pourune autre) à l’aveu, Arlequin introduit des retards qui traduisent son embarras. En parlant, il libère Lisette de ses propres scrupules et la scène s’achève sur un deuxième aveu symétrique du premier.
Ces « confessions » burlesques manifestent chez les personnages le plaisir des mots, un art de la chute… et du rebond. En effet, à aucun moment Lisette et Arlequin, malgré leur déception, ne perdentleur bonne humeur. C’est ce qui les distingue de leurs maîtres.

Analyse littéraire

I. Du quiproquo a l’aveu

a) Un double aveu
Au début de la scène, le quiproquo règne en maître, comme dans les actes précédents, et impose aux valets une courtoisie affectée. Celle-ci est marquée en particulier par le vouvoiement. Le dialogue s’oriente vers l’aveu en trois étapes. La première, ralentiepar Arlequin, le conduit finalement à révéler son identité à Lisette. La deuxième étape plus riche nous livre les réactions de Lisette et la surprise comique d’Arlequin de n’être pas chassé par sa « charitable dame ». Tout s’explique dans la troisième étape lorsque Lisette se démasque à son tour.
Marivaux dans ce double aveu utilise à la fois le contraste et la symétrie. Lisette se distingued’Arlequin par sa finesse. Après l’aveu du valet, elle prolonge son incognito pour se moquer un peu de lui. La symétrie produit un effet comique, celui de la répétition.
En effet, Lisette reprend de manière parodique l’image du soldat et du capitaine employé par Arlequin pour faire entendre qu’il n’est qu’un valet. Arlequin prend sa revanche comme l’y invite Lisette en la traitant de margotte alorsqu’elle l’a appelé magot après son aveu. Chacun n’est-il pas le « singe » (au sens d’imitateur) de son maître ? Enfin en réponse à l’exclamation de Lisette « il y a une heure (…) pour cet animal-là », Arlequin s’écrie « Mais voyez cette margotte (…) de ma misère ».

b) Un aveu difficile
Si Arlequin et Lisette font de manière burlesque assaut d’humilité c’est que l’aveu qu’ils sont contraint de faireest coûteux pour leur amour-propre et particulièrement risqué. En quittant leur masque du maître, ils renoncent à regret aux agréments du pouvoir, aux plaisirs qu’ils ont furtivement goûtés. Le carnaval est terminé et Arlequin résume ce retournement de situation en quelques formules cocasses. Il s’inquiète de l’amour de Lisette qu’il personnifie « un mauvais gîte (…) Je vais le loger petitement ». Il remarque plaisamment dans un aparté qu’Arlequin rime avec « coquin ». Il adresse enfin au conditionnel une supplique à sa Dame :  » Hélas, Madame, si vous préfériez l’amour à la gloire, je vous ferais bien autant de profit qu’un Monsieur. « . Il souligne ainsi la différence entre un valet et un « Monsieur » tout en essayant de la combler.

c) Un aveu retardé
Craignant de perdre l’être aimé,Lisette et Arlequin se livrent à des acrobaties verbales pour retarder l’aveu de leur identité. La première partie de l’extrait est à cet égard particulièrement comique. L’embarras d’Arlequin est mis en évidence par ses apartés et ses tentatives maladroites pour « préparer le terrain ». Le principal effet burlesque est obtenu par les réponses détournées et alambiquées qu’il oppose aux questions de plusen plus insistantes de Lisette. Ces détours et ce retard sont soulignés par la femme de chambre qui le somme de répondre « en un mot », « d’achever » de révéler « enfin » qui il est. Arlequin de son côté multiplie les questions apparemment sans rapport avec le sujet mais qui sont autant de clins d’œil au spectateur puisqu’elles signalent son masque tout en lui permettant de le garder : « Savez-vous ce…