La responsabilité du pr
Le Président de la république est-il politiquement irresponsable sous la Cinquième République ?
« Dans une démocratie arrivée à un certain degré d’éducation, l’autorité est inséparable de la responsabilité » écrivent Joseph-Barthélemy et Paul Duez dans un Traité de droit constitutionnel, en 1933. Ce qui pouvait être évident sous la IIIe et la IVe Républiques se révèle plus compliqué pourla Ve République. La particularité principale de la Ve République, pensée par le général de Gaulle et insaturée par la Constitution de 1958, est un chef de l’exécutif fort. La légitimité de ce Président de la République s’est accrue par le fait qu’il soit désormais élu au suffrage universel direct. Pourtant, malgré ses importantes prérogatives, le principe d’irresponsabilité politique duPrésident est posé par la Constitution de la Ve République, à l’exception de cas de haute trahison, non définie par cette Constitution. Etre responsable, c’est répondre de ses actes en subissant une sanction, mesure justifiée par la violation d’une obligation. Pour un Président de la République, être politiquement responsable, c’est avoir l’obligation de répondre de ses actes politiques, relatifs àl’exercice du pouvoir. A la différence de la responsabilité pénale qui oblige le responsable politique à répondre d’infractions commises, avec des sanctions telles qu’une amende ou une peine de prison, la responsabilité politique entraîne la possibilité d’encourir une sanction politique, c’est-à-dire, pour le Président de la République, être démis de ses fonctions, donc obligé à quitter le pouvoir. Ilpourrait en être question si sa politique a déplu, s’il s’est rendu responsable d’une violation grave de la Constitution, ou porté atteinte aux devoirs de sa charge. La Constitution de 1958 donne en théorie une fonction arbitrale au chef de l’Etat, élu pour assurer le fonctionnement régulier des pouvoirs publics et la continuité de l’Etat, ce qui pourrait justifier son irresponsabilité politique.Mais la pratique politique montre que les prérogatives du Président de la République sont très étendues ; il détient un vrai pouvoir politique sans être responsable, à la différence du gouvernement, par exemple, qui est responsable devant le Parlement. Une fois que le peuple lui a confié son mandat grâce au suffrage universel direct, il est donc irrévocable. Il existe bien une dissociation entrepouvoir politique et responsabilité politique, bien que l’on puisse imaginer d’autres mécanismes de responsabilité politique devant le peuple, notamment par l’intermédiaire des élections.
Le fait que la légitimité du Président de la République élu au suffrage universel direct se soit accrue suffit-il à justifier son irresponsabilité politique, consacrée par la Constitution de 1958?
Sil’irresponsabilité politique du Président, héritée de l’histoire constitutionnelle française est consacrée dans la Constitution de la Ve République et par la pratique politique (I), la responsabilité politique du Président reste exceptionnelle et suscite des réflexions quant aux voies par lesquelles elle pourrait être mise en cause (II).
I. Le principe d’irresponsabilité politique du Président dela République s’inscrit dans la tradition républicaine française et est consacrée par la Constitution de 1958 et la pratique politique
1. Le principe d’irresponsabilité politique du Président de la République s’inscrit dans la tradition républicaine française
– L’héritage constitutionnel français et la consécration de l’irresponsabilité politique du chef de l’EtatL’irresponsabilité politique du chef de l’exécutif est un héritage de l’inviolabilité du monarque d’Ancien Régime. On affirmait alors volontiers « Le roi ne peut mal faire ». Disposant d’un pouvoir de droit divin, le roi, il ne devait répondre de ses actes que devant Dieu. La Constitution du 3 septembre 1791 dispose que « la personne du roi est inviolable et sacrée », formule reprise par la Charte de…