La naissance des départements
HISTOIRE DU DROIT
Jusqu’en 1789, la confusion règne en France entre les provinces, les régions, les villes… Plus personne ne sait exactement à quel territoire il appartient. C’est donc sous la Révolution que les départements et les conseils généraux se substituent aux circonscriptions administratives de l’Ancien Régime complexes et confuses. Ils peuvent être définis comme chacune desdivisions administratives du territoire français, gérée par un préfet et un conseil général. Leur création marque à la fois la volonté d’uniformiser le territoire et de répondre aux souhaits d’une plus grande autonomie locale. Nous verrons donc dans une première partie la réforme pour une autonomie locale et dans une deuxième partie le découpage géographique.
C’est en 1787 que le surintendantLoménie de Brienne élargit la réforme introduite quelques années auparavant par Necker, visant à créer des assemblées provinciales dotées de prérogatives financières et administratives qui relevaient jusqu’alors des intendants. Loménie de Brienne la généralise à tous les « pays d’élections » et les assemblées abandonnent le titre de généralités pour devenir des provinces. Bien avant la Révolution, lebesoin d’une réforme est présent. Chacun guette une diminution des pouvoirs de l’intendant, jugés trop pesants, et une extension du régime des « pays d’états », dotés d’une relative autonomie financière au plan local, aux « pays d’élection ». L’édit de 1787 incite quelques assemblées provinciales à se subdiviser en départements. Par exemple, la Picardie en comptera quatre – Amiens, Doullens,Montdidier, Péronne,– au même titre que le Soissonnais, contre dix à la Haute-Normandie et neuf à l’Île-de-France.
Ces réformes déclenchent ainsi un mouvement sans précédent vers l’autonomie locale. Partout, les assemblées s’emploient à rappeler aux « pays d’élections » (généralités d’Ancien Régime placées sous la tutelle d’un intendant) que leurs anciens états ont été supprimés ou sont tombés endésuétude. Aussi, les parlements, qui réclament le retour « aux vieilles traditions françaises », se voient recalés. Les réformateurs sont décidés à concilier tradition et modernité. C’est dans l’histoire que l’on trouve les éléments de progrès susceptibles de favoriser une véritable réforme administrative, au profit des libertés provinciales.
Les cahiers des États généraux de 1789 et les revendicationsqui se font jour, de part et d’autre du territoire, réclament la simplification et la révision des divisions administratives, trop lourdes et trop complexes, qui ne répondent plus aux exigences locales nouvelles. L’objectif avoué des États généraux est de donner libre cours aux aspirations régionales. L’Assemblée nationale s’en fera bientôt l’écho. Après le 14 juillet, ses représentants se fixentpour objectif de reconsidérer l’ensemble de l’édifice politique et social de la France, en se fondant sur une logique politique et géographique fondée sur l’égalité des territoires. Entre l’État et l’individu ne doit subsister aucun groupe intermédiaire. Ce qui vaut aux Constituants d’abolir les communautés provinciales, au bénéfice d’une organisation inspirée par l’égalité et l’union. Ils saurontretenir également l’idée de Mirabeau selon laquelle « les liens qui resserrent depuis si longtemps les moeurs, les habitudes, les coutumes, les productions et le langage » doivent être pris en compte, en vue de la formation des nouvelles limites départementales.
Le 20 septembre 1789, Jacques- Guillaume Thouret, député du Tiers État de Rouen, s’inspirant d’un projet de l’abbé Sieyès, proposela création de 80 départements formant dans la mesure du possible des carrés de 18 lieues de côté (une lieue équivaut à environ 4 km) et subdivisés en districts et en cantons de même forme géométrique. Mirabeau suggère de porter leur nombre à 120, et critique vivement le principe du découpage géométrique.
Le 14 décembre, l’Assemblée établit par décret « une organisation régionale uniforme et…