L argent

novembre 27, 2018 Non Par admin

7. L’argent est un bon serviteur et un mauvais maître

Il s’agit d’un proverbe. Sa signification est assez évidente, même s’il faut distinguer deux niveaux d’interprétation.

D’une part on peut insister sur la chute, “mauvais” ou “méchant” maître. L’argent détruit celui qu’il maîtrise. Il abaisse l’âme.
L’argent exercerait en effet une influence insidieuse sur nous. Sournois, il nouspousserait à faire quantité de choses regrettables. La personnification de l’argent souligne alors que c’est nous-mêmes qui sommes personnellement en cause. Le souci de l’argent est à ce titre une forme particulièrement remarquable de souci de l’avoir et de souci de l’apparence, ce qui s’oppose au souci de soi. Dans un contexte plus religieux que philosophique, le proverbe conserve ce premier sens –l’argent doit rester un moyen et ne pas devenir une fin en soi–, et s’adjoint des règles de vie : pratiquer la charité, l’aumône. Le proverbe renvoie presque directement à la mise en garde de l’Evangile selon Matthieu (VI, 33, verset 24) : « Vous ne pouvez servir Dieu et l’argent ».
D’autre part, il est possible de remarquer la construction symétrique. L’argent est comme Janus. Il possible deuxvisages. Cette dualité serait l’idée que l’argent est un outil à double tranchant : il permet aux personnes sages et raisonnables de réaliser leurs désirs sages et raisonnables, mais il peut aussi permettre de réaliser faire triompher des désirs fous et déraisonnables. Pour rester fidèle à la mise en garde morale, un autre balancement est possible, mépriser ceux qui aiment l’argent et aimer ceux quile méprisent.
Le proverbe rejoint alors le mot de Montesquieu, « L’argent est très estimable, quand on le méprise. » Mes pensées. Un autre mot, de Tolstoï, est aussi à considérer, un peu plus proche du proverbe français : « L’argent ne représente qu’une nouvelle forme d’esclavage impersonnel à la place de l’ancien esclavage personnel », L’argent.

Répertorié en français au XVIIIème s., cetadage populaire est en fait d’origine latine. Il dériverait de l’expression du poète Horace (Ier s. av. J.-C.) : « L’argent est serviteur ou maître.»
On le retrouve dans la Préface de La Dame aux Camélias (1848) d’Alexandre Dumas fils.
« N’estime l’argent ni plus ni moins qu’il ne vaut : c’est un bon serviteur et un mauvais maître ».

Philippe Escande dans Les Echos, n° 19654 du 25 avril 2006, p.22 produit un article intitulé « De la dictature des marchés à celle des fonds » dans lequel il part du proverbe pour mettre en lumière l’opposition de deux conceptions de la finance, court termiste ou non.
« Dans sa préface de La Dame aux camélias, Alexandre Dumas fils observe avec sagesse qu’il ne faut pas estimer l’argent pour plus qu’il n’est : « un bon serviteur et un mauvais maître ». S’enservir mais ne pas être à son service, c’est bien la difficulté du patron face à la Bourse. Elle représente, d’un côté, la possibilité d’un accès simple à des ressources financières nécessaires au développement ainsi qu’une obligation de transparence comptable. Mais, de l’autre, elle livre la stratégie d’une entreprise entre les mains d’acteurs qui ne vivent pas dans le même temps : les unscomptent en mois, les autres en années. Comment ainsi augmenter son capital en promettant un retour sur trois ans à des investisseurs qui ne restent pas plus de trois mois ?
L’alternative à cette vision “court termiste” des marchés “publics” existe : les fonds de capitaux privés. La décision d’Elior le mois dernier de se retirer de la cote et d’aller chercher ses ressources ailleurs, auprès de deuxfonds, a montré qu’une entreprise, même de taille respectable, pouvait envisager la vie sans la Bourse. »
http://archives.lesechos.fr/archives/2006/LesEchos/19654-81-ECH.htm

Plus classiquement, sur le site Réforme, Antoine Nouis produit une réflexion appuyée sur les écrits chrétiens et sur la réflexion de Jacques Ellul :
« La monnaie que Marx définissait comme « l’équivalent universel »…