Immigration et racisme en italie
L’île italienne de Lampedusa, porte d’entrée de futurs clandestins
LE MONDE | 08.12.08 |
ROME CORRESPONDANT
C’est un record fait pour être battu. Samedi 29 novembre, 1 400 immigrants ont débarqué à bord de deux embarcations sur la petite île sicilienne de Lampedusa, située à moins de 100 kilomètres des côtes africaines. Chaque semaine, des centaines de candidats à l’immigration échouentsur les côtes de Sicile, parfois de Calabre ou de Sardaigne, bravant le mauvais temps et un arsenal juridique de plus en plus contraignant.
Ces arrivées à Lampedusa ne cessent d’augmenter, selon le ministère de l’intérieur : 8 800 en 2003 ; 10 477 en 2004 ; 15 527 en 2005 ; 18 000 en 2006 ; 18 047 en 2006. L’année 2007 fait exception avec 11 749 entrées, mais ce chiffre pourrait doubler en 2008. Dejanvier à septembre, les Nigérians ont été les plus nombreux, avec 4 400 arrivées, suivis des Somaliens (4 300), des Erythréens (2 900) et des Tunisiens (2 500).
Le centre de rétention provisoire (CTP) de Lampedusa, construit en 1998 pour 186 personnes puis porté à une capacité de 380, est bien trop petit pour accueillir tous ces immigrants qui sont rapidement conduits dans l’un des treizeautres CTP sur l’île ou sur le continent. Au bout de soixante jours, faute de pouvoir justifier d’un travail sur le sol italien, ils sont priés de quitter la Péninsule. La plupart entrent alors dans l’illégalité.
Cet afflux par la mer fait de l’Italie, avec ses 4 000 kilomètres de côtes, une des premières destinations choisies par les immigrants venus d’Afrique ou d’Asie. Selon les auteurs de LoStivalo Meticcio (« La Botte métissée »), ils viennent d’abord de Somalie, d’Erythrée ou d’Ethiopie pour les premiers (anciens pays de la brève colonisation italienne). Regroupés à Agadez (Niger), ils ont deux itinéraires avant d’embarquer vers l’Italie : la traversée de la Libye ou de l’Algérie jusqu’au Maroc. Depuis l’Asie, la route est plus tortueuse : Moscou, Minsk, puis les ports de Turquie.
Lesrisques encourus sont immenses. Selon la société géographique italienne, 2 000 cadavres ont été repérés par des pêcheurs dans le canal de Sicile. A Noël 1996, au large de Portopalo, 283 personnes disparurent dans la plus grande tragédie maritime en Méditerranée depuis la seconde guerre mondiale.
La péninsule s’est dotée de trois lois sur l’immigration : la loi Turco-Napolitano (centre-gauche) en1998, qui instaure les CTP et les quotas par pays ; la loi Bossi-Fini (centre-droit) qui restreint notamment le regroupement familial et conditionne l’entrée en Italie à la présentation d’un contrat de travail ; la loi Maroni (centre-droit) en juin 2007, qui crée le délit d’immigration illégale. A ces dispositions, s’ajoute le renforcement de la coopération avec la Libye pour la surveillance de sesfrontières.
Cet arsenal restrictif s’accompagne de régularisations massives qui ne disent pas leur nom, pratiquées par des gouvernements de centre-gauche comme de centre-droit, donnant à la politique migratoire italienne une impression de pilotage à vue.
Dans les prochaines semaines, 105 000 emplois de femme de ménage ou de garde-malade devraient être officiellement proposés aux nouveauxentrants. En réalité, les personnes concernées vivent déjà en Italie depuis longtemps dans la clandestinité. « C’est la dernière fois », a prévenu Roberto Maroni, le ministre de l’intérieur. On estime à 3,5 millions le nombre d’étrangers vivant en Italie et à 1 million le nombre de clandestins.
Philippe Ridet
Lampedusa et Malte débordées par l’afflux de migrants
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MALTE,LAMPEDUSA ENVOYÉE SPÉCIALE
[…] A Lampedusa, petite bande de terre italienne plus proche de la Tunisie que de la Sicile, la situation n’est pas moins explosive. Du 11 au 14 mars, quelque 600 immigrés y ont encore débarqué. Jusqu’en décembre, les migrants arrivant sur l’île n’y restaient pas, très vite transférés sur la péninsule dans des centres adaptés. Mais en janvier, le gouvernement…