Huis lcos
Pièce en un seul acte et cinq scènes, créée le 27 mai 1944 au théâtre du Vieux Colombier, Huis Clos est la pièce la plus connue de Jean Paul Sartre. L’enfer, nous dit-il, n’est pas le lieu de latorture physique, mais celui du jugement implacable d’autrui porté sur nous. Nos actes nous engagent tout entier et ne peuvent plus être modifiés. Une fois la mort advenue, nous n’avons aucune prise surce que le reste du monde en fera et la façon dont il les interprétera. Les trois personnages du drame en font l’amère expérience, chacun obsédé par son histoire, chacun en position de victime sous leregard accusateur des deux autres, chacun condamné pour l’éternité à en subir le poids. Il n’y a pas d’échappatoire : même quand la porte est ouverte, ils ne peuvent sortir du salon où ils sontretenus. Car c’est là aussi tout le paradoxe de l’affaire : ils sont devenus inséparables et totalement interdépendants les uns des autres : « les autres sont au fond ce qu’il y a de plus important ennous-mêmes pour notre propre connaissance de nous-mêmes », dira Sartre en préambule à l’enregistrement phonographique de la pièce en 1965.
La morale de Huis Clos est célèbre ; elle est clairement énoncée àla fin de la pièce : « l’enfer, c’est les Autres. » Contrairement aux représentations communes, il n’est donc pas nécessaire de descendre sous terre pour se trouver en enfer. Toute la cruauté desenfers peut s’éprouver dans les salons les plus cossus et en compagnie d’individus en apparence tout à fait fréquentables. Nul besoin de grils, de pals ni de fouets, il suffit d’être trois et suffisammentmal assortis pour que se déchaîne un tourbillon passionnel, infernal au sens strict. Sartre le démontre dans sa pièce. Tel un expérimentateur, il sélectionne parmi les caractères et les psychologiespossibles trois profils d’individus dont la combinaison sera nécessairement explosive. Il les bloque dans un décor qui les contraint à coexister, c’est-à-dire à supporter la présence de chacun des…