Emploi et mondialisation
L’impact de la mondialisation sur les suppressions d’emplois est souvent exagéré, mais il existe cependant. Comment les pouvoirs publics doivent-ils y répondre ?
Il n’y a pas si longtemps, la mondialisation était synonyme de force positive, un slogan pour l’union de toutes les nations vers un monde plus sûr, plus propre et plus prospère. Aujourd’hui, elle est pour beaucoup à l’origine de tousles maux, et notamment de la « délocalisation » des emplois vers les pays à bas salaires. Prenons les débats sur l’élargissement de l’Union européenne et sur l’accroissement des échanges avec la Chine et l’Inde. Diverses préoccupations alimentent ces discussions, mais c’est la question des conséquences de la mondialisation sur les emplois qui revient constamment chez les commentateurs comme chezles gens ordinaires.
Que la mondialisation soit bonne ou mauvaise, débat interminable et peu pertinent, elle pose néanmoins un défi aux dirigeants. En ce qui concerne l’emploi, trois questions se posent : la mondialisation cause-t-elle réellement des suppressions d’emplois ? Jusqu’à quel point ? Comment faire face à cela ?
Dès lors que la mondialisation signifie des échanges internationaux etde l’investissement direct étranger (IDE), la réponse à la première question est oui. Certains emplois des pays de l’OCDE (dans le secteur industriel notamment) disparaissent à cause de la concurrence internationale grandissante, des implantations à l’étranger ou d’autres pressions exercées par le marché international.
Mais la réponse à la seconde question est déterminante : la proportiond’emplois perdus à cause de la mondialisation en elle-même est bien moindre que beaucoup ne l’affirment. Des données provenant d’Amérique du Nord et d’Europe indiquent que 4 à 17 % des délocalisations d’emplois ou des licenciements sont causés par les échanges et les investissements internationaux. Il y a d’autres coupables : l’obsolescence des technologies, des équipements ou des compétences, ou toutsimplement une mauvaise gestion. En outre, il faut reconnaître que l’accroissement des échanges et des investissements internationaux entraîne une nette amélioration, et non une chute, des niveaux de vie. La mondialisation ouvre également de nouveaux marchés et crée des emplois.
Ces observations devraient guider notre approche en matière d’ouverture des échanges, et plus particulièrement enmatière d’emploi et de chômage. Il ne s’agit pas de sous-estimer les préoccupations quant aux licenciements, bien légitimes. Pour ceux qui sont affectés, une délocalisation est une dislocation. Perdre son emploi peut être traumatisant, et la perspective seule du changement peut angoisser et perturber des individus, des familles et des collectivités entières. Même lorsqu’un travailleur licencié trouveun nouvel emploi, la transition reste une rude épreuve.
En d’autres termes, si l’incidence de la mondialisation sur les suppressions d’emplois est souvent exagérée, elle existe cependant, et les pouvoirs publics doivent donc chercher à renforcer la capacité du marché à s’ajuster. En effet, lorsque les suppressions d’emplois résultent de décisions politiques visant à libéraliser les échanges etl’investissement, comme par exemple la levée de droits de douane, il devient nécessaire, au nom de la bonne gouvernance, de prévoir des mesures d’ajustement. Le nombre des suppressions d’emplois est peut-être moins élevé qu’on ne le croit généralement, mais les difficultés qui en résultent pour l’action publique ne doivent pas être sous-estimées.
Que peuvent faire les gouvernements ? La premièrechose à faire est d’accepter que la protection pour certains secteurs vulnérables ne marche pas – celle-ci ne fait que retarder des ajustements qui n’en deviennent que plus douloureux et plus coûteux. Revenons sur les délocalisations. Bien que les emplois de « cols blancs » soient aussi touchés par les échanges et les investissements internationaux, en particulier dans les services aux…