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Cas : Comment les briquets BIC résistent aux chinois
Dans l’usine Bic de Redon, en Bretagne, deux millions de briquets sont produits chaque jour. Tous sont contrôlés, inspectés, testés une cinquantaine de fois au cours de leur fabrication. Question de sécurité. Les briquets dont la hauteur de flamme est trop importante vont immédiatement au rebut. Ceux qui ne s’éteignent pas ou s’éteignenttrop lentement, ceux qui ne résistent pas à une chute de 3 mètres connaissent le même sort. « Alors que la norme autorise 2 secondes, tous nos briquets sont contrôlés avec un temps d’extinction de 0,3 seconde, indique Bruno Bich, président directeur général du groupe. Si un briquet Bic dépasse cette limite, il n’est pas commercialisé et fait l’objet d’une analyse en laboratoire. » Les ouvriersconsacrent 25 % de leur temps à ces contrôles. Gare à ceux qui laisseraient passer un lot ou un produit défectueux. Ils perdraient leur prime.
Pendant une quinzaine d’années, cette exigence de qualité suffisait à faire vivre l’activité sans grande difficulté. Mais, depuis la fin des années quatre-vingt, Bic doit composer avec des concurrents agressifs, les fabricants chinois. Particulièrement sur lemarché américain. Quand ils arrivent par containers sur le port de New York, les briquets chinois coûtent 5 cents l’unité. En bout de chaîne, ils sont proposés aux fumeurs à 70 cents. Les briquets Bic se vendent un dollar.
Comment les Chinois peuvent-ils casser les prix ? Il y aurait les aides de Pékin. « Les briquets asiatiques sont souvent vendus en dessous de leur prix de fabrication, commedifférentes enquêtes de la Commission européenne l’ont prouvé, assène François Bich, qui dirige l’activité briquets du groupe. Or, dans 90 % des cas, les importateurs n’ont jamais payé de taxes antidumping. » La qualité est l’autre explication. Le combustible est souvent de second choix et les fabricants en mettent moins. Il suffit d’épaissir les parois de plastique !
Malgré les prix plus bas, lesdébitants de tabac ont souvent intérêt à vendre des briquets chinois, sur lesquels ils font davantage de marge. Les Asiatiques ont donc pris d’importantes parts de marché. Depuis 1999, les importations d’Orient ont augmenté de 50 %. Le made in China représente la moitié des marchés européen et américain. Aux États-Unis, la part de marché de Bic est tombée de 44 % en 1996 34 % en 2001. En France,le mouvement est le même.
Pour riposter, il a fallu faire feu de tout bois. Premier volet de la stratégie du groupe Bich : le lobbying. Bruno et François Bich ont commencé, voici deux ans et demi, à convaincre les pouvoirs publics que les briquets chinois, de qualité médiocre, sont dangereux. Dans un premier temps, les fabricants européens de briquets se sont dotés d’une norme de sécuritévolontaire ISO 9994. Restait à la rendre obligatoire sur le marché français. De Paris à Bruxelles, jusque chez François Loos et Pascal Lamy, les deux frères Bich multiplient les visites.
À chaque fois ils exposent les résultats de tests réalisés entre 1999 et 2001 par des laboratoires européens indépendants (mais financés par la Fédération européenne des fabricants de briquets). Des tests édifiants lestrois quarts des briquets chinois présenteraient un danger réel pour [e consommateur. Souvent la flamme est trop haute, ou elle bouge, ou bien elle ne s’éteint pas… Quelle que soit l’utilisation, l’acheteur peut donc se brûler gravement. Les efforts de la direction de Bic portent leurs fruits. La norme de qualité est entrée en vigueur à l’été 2004. Leurs produits y répondent, pas ceux desconcurrents chinois.
Deuxième volet, le groupe a musclé son marketing. Il s’agit de valoriser la marque Bic. Jusqu’ici gravée sur la partie métallique du briquet, elle n’était pas assez visible. Depuis peu, un logo en couleurs figure aussi sur la partie plastique du briquet. Parallèlement, le groupe a différencié son produit en lançant de nouveaux coloris de briquets, rayures, tons pastel… et en…