Dans quelle mesure la forme littéraire peut-elle rendre une argumentation plus efficace ?
Exemple de corrigé de la dissertation S-ES
« Dans quelle mesure la forme littéraire peut-elle rendre une argumentation plus efficace ? »
I) La littérature au service de l’engagement
A – Ecrire, c’est vouloir agir, c’est agir
B – le pouvoir des mots
C – Le pouvoir des rythmes et de la musicalité
II) La littérature, permet une accessibilité renforcée de l’argumentaire…A – L’argumentation explicite
B- le succès non démenti de l’argumentation implicite
III) …ou frein à la transparence de la réflexion ?
A- l’intertextualité, les références à l’actualité : la nécessité de la contextualisation
B- le danger du vieillissement de la langue
Introduction
La littérature a joué et jouera incessamment un rôle majeur dans l’évolution desidées et des sensibilités des sociétés humaines, car l’œuvre littéraire ne saurait strictement procurer une jouissance esthétique et constituer un seul divertissement. Défendre des valeurs ou se positionner contre une injustice, participer aux débats intellectuels de son temps, conduisirent ainsi certains auteurs à se lancer dans l’écriture. Ainsi peut-on toutefois réellement affirmer que la formelittéraire rende une argumentation plus efficace ? En effet, tout d’abord, dans quelle mesure la création littéraire et la maîtrise de la langue qui l’accompagne peuvent ajouter à la conviction et à la persuasion d’autrui et en font un moyen didactique ? En quoi la stratégie privilégiée (de l’explicite à l’implicite..) par l’auteur constitue-t-elle une arme remarquable pour défendre des causes, etsusciter l’engagement du lecteur? Enfin, l’efficacité de la forme littéraire n’est-elle pas quelquefois un frein au contraire à la transparence de la réflexion ?
L’impératif d’écrire dont est animé l’écrivain peut découler de plusieurs sources. Défendre des valeurs, exposer des idées novatrices, condamner des dérèglements ou célébrer des principes remarquables, peuvent engendrerl’écriture, au même titre qu’exalter la beauté du monde, ou transcrire la complexité des rapports humains. Quoiqu’il en soit, l’écriture n’est jamais gratuite ou vaine : elle possède un pouvoir non négligeable, provoquant une réflexion, une remise en question, un éblouissement, ou encore une révélation : destinée à un récepteur (le lecteur), elle est toute entière dirigée vers l’action, elle est action. Or,argumenter, n’est-ce pas agir sur l’interlocuteur de manière délibérée, l’influencer afin de le convaincre ou le persuader de la légitimité de la thèse défendue, où de la non-conformité de la thèse réfutée ? L’argumentation est de fait indéniablement présente dans les genres littéraires traditionnels que sont le récit, la poésie et le théâtre, et ce de manière insignifiante ou importante. Lalittérature ne possède toutefois pas le monopole de l’argumentation, puisque celle-ci s’épanouit également dans les écrits non littéraires, tels que les traités, discours, publicités, plaidoiries juridiques etc…, mais elle lui consacre néanmoins des genres littéraires qui lui sont propres, tels que l’essai, le pamphlet, l’apologue (qui revêt les formes diverses de la fable ou du conte philosophique), laparabole ou encore l’utopie. La force d’action de la parole y est réelle et incontestée. L’acte d’écrire devient ainsi une authentique manière d’agir sur les événements. Ainsi, l’article-manifeste « J’accuse » d’Emile Zola, publié dans le Journal L’Aurore en 1893, plus qu’un pamphlet accusateur, s’interprète comme action, et en l’occurrence réaction d’un esprit brillant à l’encontre d’uneinjustice criante, à savoir la condamnation d’un capitaine d’Etat-Major juif, Alfred Dreyfus, accusé d’espionnage et condamné au bagne à perpétuité sur des motifs fallacieux. Dans ce cas précis, la parole, par sa force subversive de contestation, va infléchir le cours des évènements puisque l’affaire, qui avait mené à une condamnation par deux fois de l’accusé, va alors être relancée, si bien que…