Cours psychologie

août 29, 2018 Non Par admin

Les états limites :
Aspects cliniques et psychopathologiques
ou les limites dans tous leurs états
Dinard : le 19 Octobre 2002
K.Rannou-Dubas, B.Gohier

1)-Introduction :

Les états limites, émergence historique d’un concept, repérable comme limite à la nosologie psychiatrique d’une part, et comme limite au fonctionnement analytique d’autre part.

1-1)-Perspectives psychiatriques

Lapsychiatrie européenne, essentiellement franco-germanique sous l’influence de Magnan (1835-1916) en France et de Kraepelin (1856-1926) en Allemagne, s’est attachée à construire une nosographie des maladies mentales, sur la délimitation de grandes entités théoriques. La psychiatrie anglo-saxonne s’est distinguée de ce mouvement en proposant à la même époque une sémiologie descriptive issue del’observation directe des patients.

Le terme borderline est apparu pour la première fois dans la littérature médicale en 1884 avec Hugues aux Etats-Unis pour désigner des cas de symptômes physiques survenant au cours d’affections psychiatriques, et n’a plus été employé jusqu’aux années 1940.

De leur côté, les psychiatres franco-germaniques, confrontés à l’éclosion de la schizophrénie, ont effectuédes recherches sur le passé des patients, pour dépister dans leur personnalité antérieure les prémices de l’organisation pathologique actuelle. Ils ont isolé à plusieurs reprises des tableaux cliniques qui, par leur aspect ou leur évolution se situaient à la limite des cadres nosologiques établis. Ainsi, Magnan en 1893, évoque en France les  » délires curables « . Kraepelin à la même époque décritdes formes atténuées de démence précoce. Entre 1885 et 1890, Kahlbaum distingue les héboïdophrénies des démences précoces par leur propension à la délinquance et la prévalence des troubles du comportement de type caractériel, sans évolution déficitaire. En 1921, Kretschmer partage les individus normaux en deux catégories : les cyclothymes et les schizothymes, et rapproche ces derniers de laschizoïdie, qu’il caractérise par une inhibition associée à une impulsivité conduisant à une inadaptation sociale sans survenue de processus dissociatif. Ce concept est développé en 1924 en France par Minkowski. A la même époque, Claude décrit les schizoses et la schizomanie, qu’il situe entre les névroses et les psychoses. Il proposera en 1939 le concept de schizonévrose, développé également par Ey en1955, caractérisé par la coexistence de comportements névrotiques polymorphes (hystérique, obsessionnel, psychopathique) et de décompensations psychotiques aiguës (délirantes ou discordantes). D’autres termes sont créés : la schizophrénie ambulatoire par Zillboorg (1941), la schizophrénie pseudo névrotique par Hoch et Polatin (1949), les états mixtes et transitionnels schizophréniques par Palem(1958), autant de termes désignant des états frontières de la nosologie, dont la description clinique s’accorde avec celle actuelle des états limites, mais qui ne parviennent pas à se détacher du groupe des psychoses.

Les états limites ont donc été considérés initialement de nature schizophrénique. Mais bon nombre de tableaux cliniques tels que la psychopathie, mythomanie, paranoïa sensitive, voirecertaines personnalités perverses seraient sans doute de nos jours rattachés au large spectre des états limites.

1-2)-Perspectives psychanalytiques

Dans les années 1940 aux Etats-Unis, des psychanalystes se sont interrogés sur le cas de certains patients apparemment névrosés qui développaient durant leur psychanalyse une  » psychose de transfert « , altérant profondément la relation avec lethérapeute, et limitant la prise en charge analytique. Leurs recherches eurent pour objectif de cerner, au travers de la relation transférentielle établie avec le patient lors des entretiens préliminaires, ce qui permettrait de prévenir une telle situation.

En 1936, Stern réemploie le premier le terme de borderline dans son article  » Investigations psychanalytiques et abord thérapeutique…