Cours de sociolinguistique
Introduction : l’objet de la sociolinguistique
La sociolinguistique, comme l’indique ce nom composé, concerne l’étude des rapports entre sociétés et langues, mais il faut tout de suite ajouter d’une part qu’on désigne sous ce vocable non pas une branche de la linguistique, mais une autre conception de la langue, envisagée fondamentalement dès lors comme moyen de comunication entre des individusqui constituent une société, avec se règles, ses rites, ses pratiques ;cette discipline ouvre à une autre façon d’analyser les phénomènes linguistiques ; d’autre part qu’il convient encore de préciser mieux ce que l’on entend par sociétés, mais aussi par langues !
De ce fait, on comprend que cette introduction aura pour principal but de donner quelques définitions et de préciser des notions debase, mais aussi, en ouvrant à de nouvelles perspectives d’approche des phénomènes linguistiques, de donner des méthodes et de rappeler l’importance des travaux sur le terrain en maîtrisant les techniques d’enquête pour devenir vraiment « sociolinguiste ».
Comme le souligne la définition de Christian Baylon donnée sur la première page, nous serons amenés à étudier « les fonctions et les usages dulangage dans la société, la maîtrise de la langue, l’analyse du discours, les jugements que les communautés linguistiques portent sur leur(s) langue(s), la planification et la standardisation linguistiques… », et surtout à prendre conscience du phénomène de la variation linguistique !
Nous verrons quelles sont les sociétés qui intéressent le linguiste, et même plus précisément ce que l’on peutentendre par « société ». Quand on fait de la « sociolinguistique » on s’intéresse à des groupes divers, diversement structurés, qui partagent en principe des moyens de communication, et notamment ont à leur disposition une ou plusieurs langues pour communiquer. Le linguiste s’intéresse bien peu à la « société globale » qui peut retenir le sociologue, mais beaucoup plus à des groupes plus ou moins vastesqui entretiennent des relations notamment d’échanges. Une famille (restreinte ou large) peut constituer un groupe intéressant pour l’étude d’un dialecte, voire d’un idiolecte. Toutefois, une langue ne sert pas seulement à communiquer. Le rôle de la langue pour constituer la société (le groupe qui utilise la même langue, qui a les mêmes pratiques culturelles, se reconnaît dans les mêms normes,etc.) est sans doute décisif. Car la langue, qui sert à communiquer, a aussi d’autres fonctions : notamment une fonction identitaire essentielle. (il faudrait aussi rappeler que la langue a une fonction esthétique, une fonction ludique (elle sert à jouer), etc.)
Attention : C’est dans un sens un peu différent que R. Jakobson parle des fonctions du langage. Mais son analyse mérite d’être retenue pourexpliquer les différents types de communication. Tous les facteurs de la communication (émetteur, récepteur, référence, code, contact, message) sont indispensables, mais on peut choisir de centrer un discours sur tel ou tel ce qui donne une communication émotive, conative, référentielle, métalinguistique, phatique ou « poétique ».
Nous devrons avant toute chose et de façon rigoureuse essayer depréciser ce que l’on entend par langue. On appellera langue un medium de communication doublement articulé; qui a atteint un certain état de développement alors même
• qu’il connaît une certaine stabilité (souvent l’écriture acquise joue un grand rôle dans cette relative stabilité) et que les locuteurs ont à un degré ou à un autre conscience de règles de fonctionnement ;
• qu’il jouitd’une certaine reconnaissance en tant que marquant l’identité d’une communauté linguistique ;
• qu’il peut se définir par opposition à d’autres idiomes qui remplissent des fonctions comparables.
On aura toujours intérêt à préciser plus clairement le statut d’une langue comme
• langue vernaculaire / véhiculaire
• langue officielle / nationale / internationale…
• langue orale…