Comportement du consommateur

septembre 21, 2018 Non Par admin

CULTURE, DIVERSITÉ CULTURELLE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE
UNE MISE EN PERSPECTIVE CRITIQUE DE TRAVAUX RÉCENTS François FACCHINI *

Cet article participe à la recherche sur les déterminants culturels des performances économiques des nations. La première section montre que la preuve n’est pas faite que l’homogénéité culturelle est favorable au développement. Elle met au contraire en évidence lerôle primordial de la diversité culturelle dans le travail de découverte des opportunités de profit des entrepreneurs. La deuxième section présente dans le détail les travaux sur l’existence présumée de valeurs toxiques pour le développement. La troisième section critique cette idée et oppose un modèle européen de développement par l’innovation fondé sur des valeurs individualistes et un modèleasiatique de développement par l’imitation construit sur des valeurs familiales et holistes. Mots clés : Entrepreneur, culture, diversité culturelle, développement, innovation, imitation. JEL : O1, Z1. Il est acquis que l’entrepreneur joue un rôle primordial dans les dynamiques de développement économique, la croissance économique étant généralement utilisée comme un indicateur imparfait dudéveloppement et du progrès économique. L’activité productive des entrepreneurs est d’autant plus importante que les institutions lui sont favorables (BAUMOL, 1990 ; SOBEL, 2006). L’existence de préalables culturels à la croissance économique et à l’activité productive des entrepreneurs reste, cependant, une idée plus marginale (FACCHINI, 2006). Cela s’explique par le fait qu’une grande partie de lathéorie économique est a-culturelle, d’une part, parce qu’elle adopte l’hypothèse matérialiste et, d’autre part, parce que la culture a longtemps été considérée comme un concept flou car non mesurable. L’école marxiste et l’école de Chicago, qui représentent deux
* Université de Reims, EDJ et CES Paris 1 (MATISSE).

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N° 195 – JUILLET-SEPTEMBRE 2008 – p. 523-554 – REVUE TIERS MONDE523

grandes traditions de l’histoire de la pensée économique, sont matérialistes. Cela signifie qu’elles font l’hypothèse que les variables économiques déterminent les croyances individuelles. Les idées et leurs évolutions n’ont aucune autonomie vis-à-vis des contraintes économiques. Aujourd’hui on constate cependant un intérêt grandissant pour les facteurs culturels et religieux. Cet intérêtpeut s’expliquer par l’affaiblissement de la théorie de l’optimisation. La théorie de l’optimisation a fini par être affaiblie par les résultats de la psychologie expérimentale (KAHNEMAN et TVERSKY, 1979), par les critiques adressées à la défense instrumentaliste de FRIEDMAN et par l’existence de théories de l’action alternatives comme la théorie de la rationalité limitée. Cet intérêt peut aussis’expliquer par le développement autour des travaux de COASE, d’HAYEK et de NORTH d’une théorie économique des institutions conséquente. Mais aussi par l’intérêt que manifestent de plus en plus de macroéconomistes pour les déterminants politiques et sociaux de la croissance. Les travaux de BARRO (1997, 2000) sont emblématiques de cette tendance. La nouvelle économie politique reprend les hypothèsesavancées par la sociologie des religions d’Auguste COMTE et de Max WEBER afin de les vérifier grâce au travail d’enquête mené par un certain nombre d’institutions auprès des populations d’un grand nombre de pays dans le monde. Elle se donne pour ambition de définir les valeurs toxiques pour le développement économique. La culture agit directement sur les comportements individuels. Elle agit sur lechoix du nombre d’enfants, le temps de travail, le montant de l’épargne, le nombre d’années d’éducation ou la confiance. Cet article ne traite pas des effets de la culture sur les choix institutionnels, mais discute des conséquences de la culture sur les coûts de transaction (via la confiance) et sur les choix individuels (via les valeurs). Il s’agit de savoir si l’homogénéité culturelle est…