Camus la peste
Exemple de commentaire de Pierre et Jean de Guy de MAUPASSANT
(Chap. 1, du début, p. 31 à « avec un air de propriétaire », p. 33 de l’éd. Pocket 1E50)
Introduction
Guy de MAUPASSANT fait paraître Pierre et Jean dans La Nouvelle Revue fin 1887 – début 1888 et le volume paraît en 1889. Considéré par beaucoup comme le chef-d’œuvre de l’auteur, ce roman court obéit aux thèses du mouvementréaliste et est caractéristique de l’écriture de MAUPASSANT, le réel vu par les personnages, ce qui en fait aussi un roman d’analyse psychologique. Le roman raconte l’éclatement d’une famille en apparence unie à l’annonce de l’héritage d’un seul des deux fils. Il s’ouvre sur une paisible scène familiale mais le début de ce premier chapitre est déjà porteur des rivalités fraternelles et la présentationdes personnages montrent de façon subtile l’instabilité de la situation. Après une présentation des caractéristiques narratologiques de cet extrait qui en font un début de roman réaliste, nous examinerons la manière qu’a MAUPASSANT de cerner très rapidement les personnages et leurs relations.
I Un début de roman
1- Narratologie
Dans cet extrait, le narrateur est extérieur et son point de vueest omniscient (il connait les personnages comme s’il était sur la barque, plus loin il racontera l’histoire des Roland) ce qui ne sera pas le cas dans les chapitres suivants où le point de vue sera plus fréquemment interne. Le temps est celui du récit (passé simple.) Les descriptions concernent essentiellement le produit de la pêche et le physique des fils. L’emplacement des personnages sur lebateau est connu (fils à bâbord et tribord, femmes à côté l’une de l’autre à l’arrière.) Le dialogue est très réduit (pêche oblige) et les répliques, brèves et familières, concernent uniquement la pêche.
2- Situation et personnages
Le moment est peu précis, mais on sait qu’il s’agit de l’après-midi (p. 32) ce qui met M. Roland de mauvaise humeur (mauvais moment pour la pêche.) MAUPASSANT insistesur le calme de cette partie de pêche (« immobile », « mouvement très léger », « murmura », « air attendri. ») L’image est fixe : c’est un tableau.
Ce début de roman se passe sur une barque de pêche, en mer. On apprendra plus loin que le roman se passe au Havre et que les sorties en mer font partie du quotidien de M. Roland. Pierre en effectuera une également et c’est au cours d’une pêche à piedque Jean demandera la main de Mme Rosémilly. La fin du roman verra le départ de Pierre comme médecin de marine sur un paquebot et le reste de la famille l’accompagnera en barque comme au début du roman. La mer est donc omniprésente dans ce roman.
Le choix de la barque en mer comme lieu est essentiel car il s’agit d’un lieu clos dont on ne peut sortir, par principe peu stable et où le manqued’espace rend la promiscuité difficilement supportable. On peut remarquer que tous les personnages principaux sont présents et « embarqués. » Il n’y a pas de présentation étalée des personnages. La scène finale montrera l’exclusion de Pierre de la barque. Cette situation de départ est celle du déséquilibre : deux femmes et trois hommes, un couple et trois célibataires, deux vieux et trois jeunes.L’équilibre dont a besoin cette barque qui représente la famille nécessite la combinaison suivante : deux femmes et deux hommes, deux couples, deux vieux et deux jeunes. Un des deux fils doit donc partir.
3- Réalisme
A la lecture du roman, il est évident que MAUPASSANT a écrit un roman d’analyse psychologique (point de vue interne de Pierre au chapitre 2 et suivants puis de Jean au chapitre 8) : laréalité est présente et cruelle mais vue par les personnages. Les interventions de l’auteur sont rares. C’est cependant un roman réaliste. L’incipit « Zut ! » permet de rentrer in media res dans le récit et donne par sa familiarité un élément de vraisemblance. Les scènes sur ou au bord de l’eau sont des topoï du mouvement réaliste (de façon plus générale, les scènes de bateau seront très…