Analyse sémiotique du discours (compte rendu)
Dans son essai « Analyse sémiotique du discours, de l’énoncé à l’énonciation », Joseph Courtés – professeur de linguistique à l’université de Toulouse – nous révèle que le but de son ouvrage est de s’attaquer à un champ un peu moins exploré et tout à fait complémentaire de celui de la linguistique phrastique : il s’agit de l’analyse du discours. Divisé en quatre chapitres distincts, JosephCourtés essayera dans son premier chapitre — Préalables et perspectives — de nous mettre au courant de ses termes et de ses perspectives d’analyse. Ainsi, il préfère qu’on parle de langage au lieu de langue. Nous allons expliciter ce compte rendu selon l’ordre de l’ouvrage.
I. Préalables et perspectives :
1. Nature du langage :
Le langage est une capacité cognitive dont le but principal estde permettre la communication entre humains. Il sert aussi à articuler la pensée. En effet, la pensée ne peut émerger sans le langage qui lui sert à se représenter mentalement les concepts et à les manipuler. On notera que le langage et la pensée se développent à peu près en même temps. Par ailleurs, le langage est un outil d’organisation sociale important, car il permet aux locuteurs des’identifier comme membres d’une communauté donnée et ainsi de se distinguer des autres. Ceci est vrai quant aux distinctions entre régions et entre classes sociales.
Il faut cependant se garder de confondre langue et langage. Le langage est un ensemble abstrait qui recouvre toutes les langues ; c’est l’ensemble des choix offerts aux langues sur toutes les possibilités de communication orale que permet lecorps pour amener à une communication entre humains. Le terme de langage – selon l’expression de J. Courtés – « a une plus large extension. Ce vocable est à même, à notre avis, de recouvrir non seulement la classe des langues naturelles, mais aussi beaucoup d’autres systèmes de représentation dont il conviendra de préciser le statut. » La langue est un ensemble cohérent de choix fait par un groupesocial donné sur l’entier des possibilités que nous offre le langage pour communiquer entre humains. C’est une convention de communication qui permet aux membres d’une même communauté de se comprendre. De ce fait, le langage est tout ce qui met en jeu le rapport entre signifiant/signifié (F. de Saussure) et expression/contenu (L. Hjelmslev). Mais signifiant/expression d’une part etsignifié/contenu de l’autre part ne sont pas de vrais synonymes.
Selon Saussure, le signe linguistique uni, « non pas un nom et une chose, mais un concept et une image acoustique ». L’image acoustique (ou sensible) est appelée signifiant : ce n’est pas le son matériel, mais l’empreinte psychique de ce son ; le concept, appelé signifié, contient les traits distinctifs qui caractérisent ce signe par rapport auxtraits d’autres signes de la langue. Nous faisons allusion ici à l’analyse sophistiquée du langage proposée par le linguiste L. Hjelmslev. Celui-ci reprend la dichotomie de base de F. de Saussure – signifiant/signifie – en l’enrichissant. Il modifie la terminologie (signifiant part expression et signifié part contenu), mais son véritable apport est de proposer pour chacune de ces deux composantesdu langage un dédoublement selon le rapport substance vs forme.
De ce point de vue, et c’est l’autre grand intérêt de l’hypothèse hjelslévienne, la distinction proposée entre la forme de l’expression et celle du contenu autorise une étude séparée des deux plans du langage.
2. Perspectives d’analyse :
« Comparées entre elles, les différentes langues montrent qu’on ne parvient jamais parles mots à la vérité — affirme Nietzsche — ni à une expression adéquate : sans cela il n’y aurait pas de si nombreuses langues. La “chose en soi” (ce serait justement la pure vérité sans conséquence), même pour celui qui façonne la langue, est complètement insaisissable et ne vaut pas les efforts qu’elle exigerait. Il désigne seulement les relations des choses aux hommes et s’aide pour leur…