Je ne sais pas koi mettre
[…] La raison humaine est une teinture infuse environ de pareil pois à toutes nos opinions et moeurs, de quelque forme qu’elles soient : infinie en matiere, infinie en diversité. Je m’en retourne. Il est des peuples, où sauf sa femme et ses enfans aucun ne parle au Roy que par sarbatane. En une mesme nation et les vierges montrent à descouvert leurs parties honteuses, et les mariees lescouvrent et cachent soigneusement. A quoy cette autre coustume qui est ailleurs a quelque relation : la chasteté n’y est en prix que pour le service du mariage : car les filles se peuvent abandonner à leur poste, et engroissees se faire avorter par medicamens propres, au veu d’un chascun. Et ailleurs si c’est un marchant qui se marie, tous les marchans conviez à la nopce, couchent avec l’espousee avantluy : et plus il y en a, plus a elle d’honneur et de recommandation de fermeté et de capacité : si un officier se marie, il en va de mesme ; de mesme si c’est un noble ; et ainsi des autres : sauf si c’est un laboureur ou quelqu’un du bas peuple : car lors c’est au Seigneur à faire : et si on ne laisse pas d’y recommander estroitement la loyauté, pendant le mariage. Il en est, où il se void desbordeaux publics de masles, voire et des mariages : où les femmes vont à la guerre quand et leurs maris, et ont rang, non au combat seulement, mais aussi au commandement. Où non seulement les bagues se portent au nez, aux levres, aux joues, et aux orteils des pieds : mais des verges d’or bien poisantes au travers des tetins et des fesses. Où en mangeant on s’essuye les doigts aux cuisses, et à labourse des genitoires, et à la plante des pieds. Où les enfans ne sont pas heritiers, ce sont les freres et nepveux : et ailleurs les nepveux seulement : sauf en la succession du Prince. Où pour regler la communauté des biens, qui s’y observe, certains Magistrats souverains ont charge universelle de la culture des terres, et de la distribution des fruicts, selon le besoing d’un chacun. Où l’on pleurela mort des enfans, et festoye l’on celle des vieillarts. Où ils couchent en des licts dix ou douze ensemble avec leurs femmes. Où les femmes qui perdent leurs maris par mort violente, se peuvent remarier, les autres non. Où l’on estime si mal de la condition des femmes, que l’on y tuë les femelles qui y naissent, et achepte l’on des voisins, des femmes pour le besoing. Où les maris peuventrepudier sans alleguer aucune cause, les femmes non pour cause quelconque. Où les maris ont loy de les vendre, si elles sont steriles. Où ils font cuire le corps du trespassé, et puis piler, jusques à ce qu’il se forme comme en bouillie, laquelle ils meslent à leur vin, et la boivent. Où la plus desirable sepulture est d’estre mangé des chiens : ailleurs des oyseaux. Où l’on croit que les amesheureuses vivent en toute liberté, en des champs plaisans, fournis de toutes commoditez : et que ce sont elles qui font cet echo que nous oyons. Où ils combattent en l’eau, et tirent seurement de leurs arcs en nageant. Où pour signe de subjection il faut hausser les espaules, et baisser la teste : et deschausser ses souliers quand on entre au logis du Roy. Où les Eunuques qui ont les femmes religieuses engarde, ont encore le nez et levres à dire, pour ne pouvoir estre aymez : et les prestres se crevent les yeux pour accointer les demons, et prendre les oracles. Où chacun faict un Dieu de ce qu’il luy plaist, le chasseur d’un Lyon où d’un Renard, le pescheur de certain poisson : et des Idoles de chaque action ou passion humaine : le soleil, la lune, et la terre, sont les dieux principaux : laforme de jurer, c’est toucher la terre regardant le soleil : et y mange l’on la chair et le poisson crud. Où le grand serment, c’est jurer le nom de quelque homme trespassé, qui a esté en bonne reputation au païs, touchant de la main sa tumbe. Où les estrenes que le Roy envoye aux Princes ses vassaux, tous les ans, c’est du feu, lequel apporté, tout le vieil feu est esteint : et de ce nouveau sont…