Introduction à la connaisance et l’ experience
Depuis Platon, on a opposé communément la science (epistemê) à la simple opinion (doxa) (La République, livre VI, 509d-511e, «exposé de la ligne»). L’opinion tient des énoncés pourvrais sans se soucier de savoir s’ils le sont effectivement, elle relève donc de l’ordre de la vraisemblance. En revanche, la science serait une connaissance certaine et relèveraitdonc de l’ordre de la vérité. Ce caractère certain qu’on attribue à la connaissance scientifique nous incite à penser que cette dernière est «fondée», c’est-à-dire qu’elle estsoutenue par un ensemble de justifications. Quelle est la nature de ces justifications ? Il semble communément admis qu’elles relèvent de l’expérience. La connaissance scientifique seraitvraie en ceci que l’expérience prouverait la correspondance entre ses énoncés théoriques et la réalité pratique. La connaissance scientifique produirait des énoncés nomologiques surla réalité, c’est-à-dire des lois de la nature universellement et nécessairement vraies. Mais l’on remarque dans la pratique qu’il y a toujours un certain écart entre les énoncésnomologiques et leur application à la réalité. Dès lors, il convient de s’interroger sur la question suivante : peut-on fonder la connaissance scientifique sur l’expérience ? Le problèmesera de déterminer quelles sont les raisons qui nous poussent à nous fonder sur l’expérience mais aussi quelles en sont les limites puis il faudra tenter de saisir l’enjeu quirésulterait d’une impossibilité de fonder la connaissance scientifique sur l’expérience : peut-on trouver une manière alternative de la fonder ou bien cela revient-il à devoir se passer detout fondement pour la connaissance scientifique ? Dans cette dernière hypothèse, en quoi la connaissance scientifique pourrait-elle être encore qualifiée de scientifique ?