Daly zoghlami

août 28, 2018 Non Par admin

N° 6/07 – Février 2008

RECHERCHES EN ECONOMIE ET SOCIOLOGIE RURALES

L’innovation au service de l’environnement et de la performance économique
La réduction des impacts environnementaux des activités de l’entreprise se fait-elle au détriment de sa performance économique ? Il n’en est pas toujours ainsi quand on prend en compte les gains de productivité liés aux innovationsenvironnementales. Une série de travaux alliant argumentation théorique, études de cas et analyses empiriques à partir de données d’enquête ont été mobilisés pour savoir si innover pour répondre aux contraintes environnementales peut s’avérer rentable pour la firme. Tout en identifiant les circonstances et mécanismes en cause, les résultats suggèrent que, si les politiques environnementales favorisentl’innovation, elles sont en général coûteuses pour les firmes qui y sont soumises. En 2000, trois producteurs de lait et viande bovine de Champagne-Ardenne, regroupés au sein d’un GAEC (Groupement agricole d’exploitation en commun), se sont lancés dans un projet de méthanisation du lisier et de cogénération du gaz afin de chauffer leurs résidences et de produire de l’électricité à des fins de revente. Ceprojet qui a été mis en service en 2005 s’inspire des dernières technologies mises en œuvre en Allemagne et au Luxembourg. Son intérêt est double. D’une part, il permet de générer un revenu supplémentaire grâce à l’exploitation d’un sous-produit de la production laitière : l’investissement de 201 400 euros, subventionné à hauteur de 118 500 euros par divers organismes (Conseil général, ADEME,Crédit agricole), devrait être rentabilisé en six ans par les économies de chauffage et la vente d’électricité à EDF. D’autre part, il réduit l’impact de l’activité économique sur l’environnement. En effet, la méthanisation du lisier réduit les émissions de méthane et d’oxyde nitreux (N2O), deux puissants gaz à effet de serre qui contribuent au réchauffement climatique global. De plus, le lisiertraité par méthanisation est quasiment inodore, ce qui réduit les nuisances olfactives pour le voisinage. Voici un des exemples décrits par Lanoie et Llerena (2007) de choix de technologie verte qui améliore à la fois la performance économique et la performance environnementale. Innover pour réduire les émissions de rejets polluants, les risques de contamination ou la consommation de ressourcesnaturelles rares (énergie fossile, eau) peut donc s’avérer rentable sur un plan économique. Les gains de productivité ou de part de marché associés à une meilleure gestion environnementale compensent parfois le coût initial de l’innovation ou l’investissement dans la nouvelle technologie.

L’hypothèse de Porter
C’est sur la base de cet argument que repose ce qu’il est commun d’appeler « l’hypothèse dePorter ». Cette hypothèse a été mise en avant par Michael Porter, Professeur de management stratégique à l’Université d’Harvard, et son coauteur Claas van der Linde. En se basant sur des cas similaires d’innovations « vertes » qui se sont avérées profitables, les auteurs avancent que la pollution constitue souvent un gaspillage de ressources et qu’une diminution de la pollution est généralementassociée à une amélioration de la productivité avec laquelle les ressources sont utilisées. Ceci implique que des politiques environnementales plus strictes, mais bien pensées (en particulier, l’utilisation d’instruments économiques comme les taxes vertes ou les permis échangeables) devraient inciter les firmes à innover pour réduire ces sources de gaspillage et réduire ainsi leurs coûts. Despolitiques environnementales plus sévères peuvent donc associer bénéfices sociaux (réduction des dommages environnementaux) et bénéfices privés pour les firmes qui y sont soumises. Toujours selon cette hypothèse, ces bénéfices privés dépasseraient souvent les coûts supportés par les pollueurs pour se conformer à la réglementation environnementale (le changement de technologie, d’organisation de la…