Croissance verte
Janvier 2010
n°164
ANALYSE
La croissance verte : quels impacts sur l’emploi et les métiers ?
La croissance verte est volontairement abordée ici d’une façon large, comme un processus de renouvellement dont l’impact net sur l’emploi dépendra notamment des politiques qui seront mises en œuvre mais dont l’ampleur soulève des défis importants en matière de métiers et de formation. Ces derniersne se limitent pas à l’éclosion de compétences spécifiques et inédites dans quelques filières spécialisées. Il s’agit le plus souvent de compétences transversales affectant des volumes très importants de personnels dans un grand nombre de secteurs imposant une adaptation substantielle des dispositifs de formation.
Comment les objectifs environnementaux modifient-ils le niveau et la structure desemplois par secteurs et par métiers ? Le concept de croissance verte suggère la montée de nouveaux besoins et la réalisation d’investissements spécifiques favorables à l’éclosion de nouveaux marchés ; Ce surcroît potentiel de dépenses ne constitue pas un moteur inconditionnel de créations nettes d’emplois pour l’ensemble de l’économie. Le « verdissement » des économies repose, en effet, surl’octroi d’un prix à des biens libres considérés jusqu’ici comme inépuisables. L’apparition de coûts supplémentaires pesant sur les agents devrait en théorie induire un ralentissement de la croissance, toutes choses égales par ailleurs. La dispersion des analyses concernant l’impact des politiques environnementales sur l’emploi, dont une récente recension permet de prendre la mesure1, témoigne de laprofonde incertitude qui entoure la performance globale en matière d’emploi et de croissance d’une économie verte. Saisir le versant positif de la contrainte environnementale requiert la mobilisation d’arguments moins classiques. S’il y a un espace pour une croissance verte, c’est peut-être d’abord parce que la mesure de la croissance par le PIB est entachée d’un biais originel : comptabilité decoûts, elle tend à valoriser toute dépense supplémentaire quelle que soit l’utilité qui y est associée alors que les dégradations occasionnées par l’activité productive ne sont pas ou peu prises en compte2. Vue sous cet angle, la croissance verte aurait quelques similitudes avec un effort de reconstruction. La modification du système de prix n’est ensuite pas neutre sur l’orientation de l’effortd’innovation et peut en définitive favoriser à terme des modes de production plus économes en énergie. Le bouclage macroéconomique de la croissance verte est intimement lié à l’analyse que l’on fait du progrès technique et de sa diffusion. Ce diagnostic conditionne la dynamique des revenus, leur répartition et, in fine, la vitesse d’émergence des nouveaux modes de consommation. Cette incertitude au niveaumacro-économique ouvre la voie à une scénarisation de la croissance verte. Dans tous les cas, les processus de réallocation inter et intra-sectoriels seront de forte ampleur. Les défis en matière d’adaptation des compétences couvriront dès lors un large spectre de secteurs et de main-d’œuvre.
Voir « Employment in Europe 2009 », Annexe 2, p.133-135 :http://ec.europa.eu/social/BlobServlet?docId=4196&langId=en Note de Veille n° 91 (février 2008) – Analyse : Au-delà du PIB, le bonheur ?, voir notamment les travaux pionniers de Nordhaus et Tobin au début des années 1970.
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Centre d’analyse stratégique
La croissance verte, un processus de destruction créatrice
La note de veille n° 164 – Janvier 2010
La définition d’objectifs environnementaux ouvre de nouvellespotentialités de développement et induit simultanément des coûts supplémentaires et un déclassement de certaines activités. Avant de se prononcer sur le solde de ce jeu de destruction et de création simultané d’activités, le fait d’aborder la croissance verte comme la combinaison de chocs contradictoires qui affecteront l’économie et de les sérier avec précision permet de saisir la profondeur de la…