La politique est-elle une science ou un art ?
Bien que cerner le terme de « politique» apparaisse comme réellement problématique on peut en dire d’une manière générale qu’elle est l’organisation méthodique,des actions d’un gouvernement au pouvoir sur des bases conceptuelles définies et finalisées en vue de maintenir l’équilibre social. Ce dernier est nécessaire a la population,ainsi qu’à l’évolution de leurs rapports avec d’autres ensemblesgouvernés.
Mais la politique relève-t-elle d’un savoir théorique, d’une connaissance universelle du bien et du mal ou bien au contraire d’un savoir-faire ? L’homme politique est-il plus proche du scientifique… ou… de l’artiste ? Chacune de ces deux notions présentent des aspects dans lesquels on peut retrouver des caractéristiques de l’idée générale que l’on se fait de la politique. L’artest un concept qui apparaît le plus souvent comme flou et subjectif et suppose l’intervention d’un agir libre qui réalise dans l’œuvre une fin qui lui préexiste. On peut reprendre ici la distinction que Marx faisait entre l’architecte et l’abeille, le premier agissant selon un plan ou une idée tandis que la seconde, quelle que soit la complexité de son activité, agit mécaniquement. Cependant, ce quevise la technique c’est l’utilité de son produit dans les activités humaines. Or, de ce point de vue, c’est une condition de l’œuvre d’art qu’elle soit « inutile » ou plus exactement désintéressée. Elle prend sa valeur grâce à l’action de l’homme, qui la produit, l’interprète et ce, de manière subjective. La Science est la connaissance relative à des phénomènes obéissant à des lois et vérifiéspar des méthodes expérimentales au moyen de trois composantes : l’observation, l’expérimentation et les lois. « La science est par essence hypothèse et vérification à l’infini » (Husserl). Peut-on, dès lors, envisager la politique d’un point de vue épistémologique et cognitif ? Si la gestion politique repose en partie sur un raisonnement, l’idéologie politique, elle, suppose également une croyance,voire une conception de la nature humaine qui relève davantage d’impressions et de sensations que la science ne peut entériner.
» L’accord de tous les intérêts se forme par opposition à celui de chacun. S’il n’y avait point d’intérêts différents, à peine sentirait-on l’intérêt commun qui ne souffrirait plus d’obstacle: tout irait de lui-même et la politique cesserait d’être un art » Rousseau(Chapitre 3 du Contrat social). Cette formule étonnante de Rousseau annonce l’ idée développée au livre 3 du Contrat social: » S’il y avait un peuple de Dieux, il se gouvernerait démocratiquement ». Si nous étions des Dieux, nous aurions des intérêts communs, nous les connaîtrions et nous adopterions les lois assurant la promotion de ces intérêts. Mais si nous étions des Dieux, nous n’aurions pas besoind’être gouvernés.» Pour Rousseau, comme pour Machiavel (et contrairement à toutes les idées reçues), lorsque l’on se pique de politique, il faut prendre les hommes tels qu’ils sont (égoïstes, peu éclairés…), et non tels qu’ils doivent être. Les hommes étant ce qu’ils ont, ils ont et auront toujours des intérêts et des objectifs inconciliables, c’est pourquoi ils sont incapables de se donner deslois à eux-mêmes « Il faudrait des Dieux pour donner des lois aux hommes ». Dans ces conditions, la politique est bien conçue par Rousseau comme une aptitude à gérer des intérêts contradictoires (ce qui annonce la thèse de Claude Lefort : « la démocratie, c’est l’institutionnalisation du conflit ») et non pas comme un science fondée sur une théorie de la justice formulée par exemple dans des textes,tels que justement le Contrat social.
La politique se révèle bien aléatoire et les hommes d’État doivent trouver des solutions qui ne valent qu’au cas par cas. Sur ce point Rousseau rejoint Machiavel et Montesquieu.
La politique est un art : ce qui est décisif , c’est la capacité qu’a l’homme politique de prendre la bonne décision, au moment opportun. La décision politique relève donc en…