Télé-réalité
Commentaire de l’arrêt de la Cour d’appel de Paris du 12 février 2008.
Il est curieux de constater qu’un contrat aussi fréquent que le contrat de travail ne fait l’objet d’aucune définition légale. Il est en effet revenu à la jurisprudence d’établir une définition du contrat de travail.
Dans le cas qui nous intéresse, Madame Adamiak, participante à « l’Ile de la tentation » avait poursuivila société de production de l’émission afin que lui soit reconnu le statut de salarié. Dans un premier temps, le Conseil des prud’hommes lui avait donné raison dans une décision du 30 novembre 2005, condamnant ainsi la société de production à une centaine d’euros de dommages et intérêts. Cette dernière, mécontente de la décision, avait donc fait appel estimant que l’activité des participants,consistant dans le fait de rester simplement soi-même, ne constituait pas un travail au sens strict du terme, ce qui justifiait par conséquent que les participants ne puissent être dotés du statut de salariés.
Il s’agit de savoir si un contrat de télé réalité peut constituer un contrat de travail ou bien simplement un contrat de participation à un jeu.
La Cour d’appel de Paris, par un jugement endate du 12 février 2008, a rendu trois décisions confirmant la décision du Conseil des prud’hommes et a choisi d’élever le montant des dommages et intérêts à environ trente mille euros pour chacun des trois participants. Selon elle, la relation entre la société de production et les candidats participants représente un contrat à durée indéterminée.
Cet arrêt exprime clairement les difficultésd’appréciation quand il s’agit de caractériser un contrat de travail.
Nous envisagerons de répondre à cette question en étudiant tout d’abord en quoi un contrat de télé réalité constitue un véritable contrat de travail, puis, dans un second temps, nous nous intéresserons au fait que l’émission est en réalité inconciliable avec les règles de droit du travail.
I- Le contrat de télé réalité oucontrat de travail.
Le contrat de travail est un contrat par lequel une partie, le salarié, s’engage à réaliser un travail subordonné, pendant que l’autre partie, l’employeur, s’engage à lui verser en contrepartie un salaire. Pour qu’un contrat soit qualifié de contrat de travail, trois éléments doivent donc être réunis : un travail, un salaire, et un lien de subordination.
A)Un nécessairetravail subordonné.
Toute activité n’est pas nécessairement un travail. Pour qu’elle le soit, elle nécessite en effet qu’il y ait une prestation de travail ainsi que la présence d’un lien de subordination.
• Une prestation de travail : la Cour d’appel de Paris retient deux éléments pour justifier que les participants à « l’Ile de la tentation » sont des salariés. Elle estime que « l’immixtionde caméras dans la vie privée ne relève pas d’un simple divertissement » et que « le règlement liant les parties (…) impose en effet une disponibilité permanente du participant pour le tournage ». Il s’agit donc ici d’une mise à l’épreuve des candidats vis-à-vis de leurs sentiments ce qui constitue bien une sorte de travail de la part des candidats ou, plus précisément « une activité humaineexigeant un effort soutenu ».
• Le lien de subordination : le lien de subordination est caractérisé par le fait que les participants reçoivent des ordres et des directives, notamment sur la façon de se comporter et sur les horaires à respecter ce qui nous permet de dire qu’ils sont à l’entière disposition de la société de Production. Il est de plus prévu dans le règlement que le producteur a ledroit de sanctionner par la rupture unilatérale du contrat le non-respect par les candidats des obligations du règlement. Ces éléments caractérisent donc un lien de subordination pour la Cour d’appel puisqu’il s’agit de l’exécution d’un travail sous l’autorité d’un employeur ayant le pouvoir de donner des ordres et des directives et d’en sanctionner les manquements.
B)Une activité…