Premices géoéconomie
Prémices géoéconomiques
Yannick Brun-Picard Résumé : Cet article à pour objectif de présenter des éléments pouvant être considérés comme des bases de l’élaboration du domaine de connaissance de la géoéconomie. Cette démarche repose sur une approche ancrée au cœur de l’humanisme contemporain et des épistémologies constructivistes et génétiques. Ce positionnement inscrit l’action de cartographierpour le contrôle des espaces terrestres, la volonté de compiler tous les savoirs disponibles sur les territoires et celle de maîtriser les contraintes des espaces comme des démarches sources des prémices de la géoéconomie, sans pour cela la définir. Ainsi ce domaine du savoir émerge peu à peu au carrefour des diverses sciences humaines et plus particulièrement de la géographie. Mots clefs :géoéconomie, géographie, épistémologie, interface humanité/espaces terrestres, réentrée, moindre contrainte, rupture/continuité, différenciation, temporalité, conquête, contrôle
Introduction
La perception que nous avons du monde et notre refus de nous voir ancré dans l’immédiateté médiatique nous orientent en direction de faits lointains. La connaissance du domaine géoéconomique ne s’est pas élaboréeen quelques années, des civilisations ont développé des trésors d’ingéniosité pour parvenir à gérer et à exploiter leurs vastes territoires. En prenant pour base originelle cette mémoire lointaine des cours d’histoire sur Sumer, l’Egypte et Rome, nous émettons l’hypothèse que des prémices, à ce qu’est devenue la géoéconomie, étaient déjà perceptibles. Ce positionnement anachronique pour lesdémarches contemporaines prend naissance au cœur des orientations humanistes1, de la phénoménologie2, des épistémologies constructivistes et génétiques ainsi que de l’humanisme en géographie3. La perception est l’action initiale. Nous acceptons l’observation, sans pour cela renier les technologies modernes qu’elles soient quantitativistes ou satellitaires. L’observation nous plonge dans l’empirie et unepart d’éléments subjectifs. Un domaine scientifique ne peut souffrir de la subjectivité. Pourtant le bon sens nous permet de percevoir la disparition des glaciers et la hausse des températures. Par ce choix nous sommes placés aux marges des démarches scientifiques sans pour cela nous en exclure. Quelles sont les prémices géoéconomiques sur lesquels nous pouvons fonder notre observation afin depercevoir cette longue élaboration ? Au regard d’une partie de l’évolution des savoirs nous voulons mettre en exergue des éléments qui pourront être considérés comme des prémices à la géoéconomie. Nous retenons pour définition de la géoéconomie celle donnée par Pascal Lorot 4. Nous demeurons dans ce cadre définitoire afin de mettre en lumière les éléments initiaux à cette émergence. La volonté decartographier pour contrôler, celle d’écrire et de communiquer et celle de maîtriser les
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John PICKLES, 1988, Geography and Humanism, Norwick, Geo books, 64 p. Maurice MERLEAU-PONTY, 1945, Phénoménologie de la perception, Paris, Gallimard, 531 p. 3 Antoine BAILLY, Renato SCARIATI, 1990, L’humanisme en géographie, Paris, Anthropos, 172 p. 4 Pascal LOROT, La géoéconomie, nouvelle grammaire desrivalités internationales, pp. 110-120
contraintes des espaces terrestres sont, pour notre perception des prémices de la géoéconomie, les éléments initiaux à l’émergence de ce domaine du savoir.
Cartographier pour contrôler
La conquête de marchés, la mise en œuvre de processus économiques performants, la rentabilité d’un territoire, la préservation et l’amélioration de celui-ci, les jeuxd’équilibres entre les flux financier, humains, les produits, ainsi que la maîtrise territoriale en fonction des aménagements et surtout de la connaissance des espaces terrestres5, sont des constituants, non restrictifs, de la géoéconomie6. Des relations, des dynamiques et des constructions sont visibles sur les territoires. Une forme de géographicité se développe par le contact souvent rugueux…