Valeurs et systèmes d’informations
Valeur ajoutée et système d’information
À débat complexe, solutions toutes faîtes ?
À la fin des années 1980, le prix Nobel d’économie Robert M. Solow énonça le paradoxe selon lequel les investissements informatiques des quinze années précédentes, bien que motivés par la recherche de gains de productivité, n’avaient pas prouvé leur efficacité. Sur une période de temps semblable, d’autresgisements de productivité auraient par le passé suscité de véritables révolutions industrielles, déterminant des cycles de croissance économique. Nicholas Carr (2004) a récemment relancé le débat de la valeur ajoutée informatique, dont la difficulté est de ne trouver réponse ni dans des prises de position subjectives, ni dans des outils de calcul prétendant à l’objectivité, ni dans le recoursaveugle à l’externalisation de tout ou partie du système d’information.
L’externalisation étant de plus en plus fréquemment adoptée, nous débutons par son analyse. Nous proposons ensuite une définition rigoureuse du processus de création de valeur par le système d’information. Puis, nous confronterons cette définition à deux approches éprouvées de la création de valeur, avant de conclure surl’importance des notions de subjectivité et de mesure.
L’externalisation pose plus de questions qu’elle n’apporte de réponses
L’externalisation informatique n’est un moyen certain de créer de la valeur que par la maximisation des composantes de la valeur actionnariale, en agissant sur la rentabilité des capitaux investis. Externaliser permet de générer un revenu d’exploitation structurellementplus élevé en « immobilisant » moins et donc en diminuant les dotations aux amortissements. Cela suppose néanmoins d’avoir étudié de quelle manière la valeur était générée par le système d’information (ce qui peut fortement varier d’un secteur d’activité à un autre, ainsi qu’en attestent les référentiels sectoriels sur lesquels reposent les progiciels de gestion intégrée), et d’avoir traduit cesobservations en analyse bilantielle.
Autre question ouverte par le recours croissant à l’externalisation de tout ou partie du système d’information : la place de celui-ci dans l’entreprise étendue. L’externalisation informatique offre en effet de multiples visages, qui sont autant de réinterrogations de la nécessité de maîtriser telle ou telle partie de la chaîne de valeur. Offshore,l’externalisation est confiée à un prestataire physiquement éloigné du commanditaire. Inshore (certains ajoutent la distinction nearshore), elle peut être confiée à une société qui occupe la même tour de bureaux. Onshore, la prestation peut être délivrée dans les locaux mêmes du commanditaire, et fréquemment par ses ex-employés, pour qui seul change l’employeur. Se pose alors la question du degré de contrôlequ’il est souhaitable d’exercer – physiquement ou à distance, mais toujours dans le cadre d’engagements de service (SLA, service level agreements) – sur telle ou telle partie jugée stratégique, car créatrice de valeur, du système d’information.
Externaliser est donc une solution à certains aspects financiers du dilemme de la création de valeur par le système d’information. Toutefois, que l’onait ou non recours à une sous-traitance intégrale (cas de plus en plus fréquent, contrebalancé par quelques mouvements de réinternalisation, comme chez Boursorama), l’externalisation reste un pari managérial sur le solde de valeur créée in fine.
Définir la création de valeur par le système d’information
La création de valeur par le système d’information nous semble devoir être définie dansla continuité des logiques proposées par le contrôle de gestion, qui singularise les concepts d’efficacité et d’efficience, et pose la question de leur mesure respective. Nous proposons trois définitions, de granularité croissante, de la création de valeur par le système d’information.
On définira tout d’abord la création de valeur de manière très globale, renvoyant ainsi à la seule notion…