A chacun selon son mérite
* Analyse du sujet
– A chacun autant : Une telle maxime a pour fondement l’égalité irréductible de chaque individu. Quelque soit donc le travail fournit, quelque soit l’effort, la peine, le temps, etc., chaque personne doit recevoir la même rétribution. Il semble alors qu’une telle maxime exprime l’égalité idéale entre les hommes et ce indépendamment de toutes les contingenceséconomiques, politiques ou sociales. Elle prône donc une égalité absolue et irréductible des individus entre eux.
– A chacun selon son travail : Là où précédemment l’on faisait primer une égalité inconditionnelle, c’est le principe d’équité qui est au fondement de cette maxime-ci. En effet, dire que chacun doit être rétribuer en fonction de son travail, c’est poser le principe d’une rétributionéquitable sur fond de proportionnalité. Est-il juste que quelqu’un qui produit plus qu’un autre soit plus rétribué ? C’est au fond la question que pose une telle maxime. Notons par ailleurs qu’elle fait ici entrer un étalon qui était non pas seulement absent mais plus profondément indifférent, à savoir le travail – et plus précisément la productivité engendrée par le travailleur. Une telle maximelie donc justice et économie. Et c’est cette liaison qui peut faire problème : l’idéal de justice doit-il être attaché à une question économique ?
– A chacun selon ses besoins : Ici, ce n’est plus le travail qui sert d’étalon à la rétribution mais bien le besoin. En effet, il s’agit de faire valoir ici aussi le principe d’équité mais appliqué en référence au besoin : ceux qui seront leplus dans le besoin auront une rétribution plus grande. Il s’agirait alors d’une sorte de justice corrective, au sens aristotélicien, qui viendrait combler les inégalités de ressources et de richesses.
– A chacun selon ses mérites : Ici, et encore une fois selon le principe d’équité, c’est le mérité qui sert d’étalon à l’évaluation équitable des rétributions. On fait donc primer ici lanotion d’effort produit par le travailleur. Mais le mérité n’est pas simplement lié à l’effort, à la pénibilité du travail, il peut aussi être tenu pour un avantage dû à un certain talent. On comprend en tout cas que dans une telle maxime, c’est encore la notion d’efficacité économique, sociale ou encore politique qui est ici privilégiée.
– Le mot français « justice » vient du latin jus quiveut dire le droit ; aussi le terme signifie-t-il, dans son acceptation la plus générale, le respect du droit, la conformité au droit. Cette définition peut elle-même renvoyer à deux choses : à l’institution judiciaire et à une notion morale. Le sens de la justice est propre aux individus, aux consciences, face à ce qui est inhumain. Il vaut par sa spontanéité, par son exigence ardente et le refusa priori des compromissions de la prudence ou de l’intérêt bien compris. Il vaut aussi par son indifférence aux positions sociales, aux mérites divers, aux talents : tout homme peut l’avoir et notre propre sens de la justice nous dit même que tout homme doit l’avoir.
– Or, l’idéal de justice, c’est-à-dire la justice dans sa perfection, dans son essence même – quand bien même les modèlesde justice existants ne seraient que des réalisations imparfaites – est-il représenté par l’une de ces maximes, et si oui, laquelle l’expriment le plus adéquatement ? Ce qui est donc ici mise à la question c’est la définition de la justice dans ce qu’elle a de plus pure et de plus accompli.
* Problématique
L’idéal de justice auquel nous aspirons tous – c’est-à-dire que l’on doit tendre àréaliser aussi parfaitement et aussi adéquatement que possible dans nos sociétés – a-t-il pour fondement une égalité inconditionnée et inconditionnelle ou passe-t-il plutôt par un principe d’équité ? Et si tel est le cas, quel est cet étalon par lequel la rétribution sera la plus juste possible ? En quoi donc l’idéal de justice est-il ce qui doit guider toutes nos actions et ce vers quoi l’on ne…